NorthStar Ciel et Terre s’enracinera au Luxembourg après un tour de financement d’environ 58 millions de dollars auquel participe ce minuscule pays d’Europe. Toujours à la recherche de financement, l’entreprise espère que cet appui incitera le gouvernement Trudeau à soutenir ses activités et à assurer le maintien de son siège social à Montréal.

L’entreprise, dont l’actionnaire principal est l’homme d’affaires Charles Sirois, ambitionne de déployer une constellation de 52 satellites – en deux phases – pour « gérer le trafic » dans l’espace. Au fil du temps, la multiplication des satellites et des débris orbitant autour de la Terre a accru les risques de collisions, lesquelles aggravent le problème en créant de nouveaux débris.

« J’espère que le Canada va réaliser que la technologie que NorthStar a créée est de classe mondiale, explique son président et chef de la direction, Stewart Bain, joint à Madrid. J’espère que le [gouvernement fédéral] va nous appuyer pour nous permettre de déployer un service de qualité. »

Le Luxembourg Future Fund (LFF), le fonds d’investissement luxembourgeois, injecte près de 15 millions pour entrer au capital de NorthStar. Le reste des fonds proviennent de Telesystem Espace, contrôlée par les familles Sirois et Rogers, et d’autres investisseurs privés.

En échange, l’entreprise, qui compte environ 45 employés dans la métropole, implantera son siège social européen au Luxembourg, où elle effectuait déjà de la recherche.

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Stewart Bain, président et chef de la direction de NorthStar

« C’est pour nous aider avec le développement de produits et les vendre auprès de clients en Europe, dit M. Bain. Le Luxembourg est agressif [dans le créneau des constellations de satellites]. Ça sera complémentaire au savoir-faire de Montréal. »

Le pays enclavé entre la France, la Belgique et l’Allemagne est reconnu pour sa fiscalité favorable, mais ce n’est pas ce qui a incité NorthStar à y implanter une antenne, affirme M. Bain.

Depuis sa fondation, l’entreprise a récolté environ 100 millions auprès de Québec et d’Ottawa (13 millions de chacun des ordres de gouvernement) et de Space Alliance, coentreprise des géants européens de l’aérospatiale Thales et Leonardo.

Pas encore en orbite

Les trois premiers satellites sont actuellement construits par Thales Alenia Space, mais NorthStar n’a toujours pas annoncé de contrat en bonne et due forme. M. Bain ne demande pas nécessairement une nouvelle contribution financière d’Ottawa, mais il aimerait voir le gouvernement fédéral devenir client de l’entreprise qu’il dirige.

Le plus important message que je peux envoyer à un investisseur, c’est que j’ai un client d’envergure. Les gouvernements doivent être les premiers clients des services que des entreprises comme NorthStar offrent.

Stewart Bain, président et chef de la direction de NorthStar

Au pays, le gouvernement Trudeau a appuyé financièrement Télésat, société active dans le créneau des satellites, mais du côté des télécommunications. Il a aussi conclu une entente pour être parmi ses clients. C’est ce type d’entente que NorthStar aimerait obtenir.

NorthStar pourrait-elle envisager de s’installer ailleurs si elle n’était pas en mesure d’obtenir de nouveaux appuis ici ?

« Il y a un risque, mais on va essayer de gérer tout cela, répond M. Bain. Je suis loyal au Québec, mais […] on doit faire ce qui est le mieux pour la société. »

NorthStar est inscrite pour faire du lobbyisme auprès de Québec et d’Ottawa. Dans les deux cas, les démarches visent entre autres à obtenir du soutien financier.

Pour réaliser ses ambitions, l’entreprise estime qu’il lui faudra 2,4 milliards en financement. La première constellation de 12 satellites devrait lui permettre d’effectuer une surveillance depuis l’espace.

Dans un deuxième temps, elle souhaite mettre en orbite 40 autres satellites équipés de caméras hyperspectrales. Leurs images seraient analysées par des systèmes propulsés par l’intelligence artificielle. Ceux-ci seraient capables de mesurer l’irrigation d’un champ pour le compte d’un fermier, de détecter une fuite dans un oléoduc ou de repérer les risques d’incendie dans une forêt.