Moins de six mois après avoir converti son magasin Provigo de Victoriaville en franchise, voilà que Loblaw a décidé de fermer définitivement le supermarché récemment acquis par le marchand. Il cessera ses activités d’ici la fin de l’année.

En décembre dernier, Loblaw, qui gère les enseignes Maxi et Provigo, avait annoncé son intention de prendre un virage visant à vendre ses 25 magasins Provigo à des franchisés pour la somme de 50 000 $. Cette décision n’était pas passée inaperçue, puisque le prix demandé était alors considéré comme étonnamment bas.

C’est d’ailleurs en apprenant la nouvelle dans les journaux que François Laquerre a décidé de se porter acquéreur du magasin de Victoriaville. Il est devenu franchisé en juillet 2021. « On avait le goût de réussir dans tout ça, mais je comprends très bien la décision [de Loblaw] », a-t-il indiqué au cours d’un bref entretien téléphonique, au cours duquel il a tenu à dire qu’il ne pouvait pas donner « beaucoup d’informations ».

Cette décision, qui n’est pas la sienne, c’est de mettre fin aux activités du magasin situé à la Grande Place des Bois-Francs d’ici la fin de l’année. La nouvelle a récemment été diffusée sur le site internet du journal local La Nouvelle Union. Près de 75 emplois sont touchés. « La décision de fermer le magasin a été difficile à prendre, a écrit par courriel Johanne Héroux, directrice principale aux affaires de l’entreprise et aux communications chez Loblaw. La concurrence dans ce secteur de Victoriaville est très féroce. »

Malgré tous les efforts du nouveau franchisé, la rentabilité n’a pas été au rendez-vous et tout semble indiquer qu’il serait impossible de renverser cette tendance. Nous en sommes venus à la conclusion qu’il était dans le meilleur intérêt de tous de fermer le magasin.

Johanne Héroux, directrice principale aux affaires de l’entreprise et aux communications chez Loblaw

M. Laquerre admet également que la concurrence est grande dans ce coin de la ville. « À Victoriaville, on est tous situés dans le même secteur. La compétition est là. » Dans un rayon de moins de deux kilomètres, les consommateurs retrouvent effectivement quatre autres supermarchés : IGA, Metro, Super C et Maxi.

« Nous passons régulièrement en revue la performance de chacun de nos magasins afin d’en optimiser le rendement en fonction du profil démographique de la clientèle, de la concurrence, de notre propre empreinte dans un secteur donné, etc., a expliqué Mme Héroux. Nous ne comptons pas ouvrir de nouveau magasin à Victoriaville. »

M. Laquerre soutient toutefois ne pas avoir essuyé de pertes financières avec la fermeture. Selon ses dires, il récupérera la somme de 50 000 $ investie au départ. Une information qui n’a pas été confirmée par Loblaw. « Je ne peux malheureusement pas faire de commentaires sur la compensation qui sera offerte au franchisé de Victoriaville », a indiqué Johanne Héroux.

Impossible de savoir pour le moment ce qu’il adviendra du local qui sera libéré à la fin de l’année. Le directeur général de la Grande Place des Bois-Francs, Martin Sévégny, nous a dirigée vers Cogir, société qui gère le centre commercial, que La Presse a tenté en vain de joindre.

Ne devient pas franchisé qui veut

En dépit de cette fermeture, Loblaw tient à assurer que le programme de franchisage se poursuit. Jusqu’à maintenant, sur 25 magasins, près de la moitié sont devenus propriété d’un marchand. L’entreprise a reçu plus de 1000 candidatures. « Nous avons toutefois réduit la cadence afin de nous assurer que toutes les conditions gagnantes soient réunies pour chacun des sites (marché, taille du magasin, choix du franchisé) », précise Johanne Héroux.

Lors de son annonce en décembre 2020, Loblaw avait comme objectif de franchiser l’ensemble de son réseau d’ici la fin 2022. Ne devient pas franchisé qui veut, tient toutefois à dire Mme Héroux.

Si la mise de fonds peut sembler peu élevée, les autres considérations financières font en sorte qu’il s’agit d’un réel investissement.

Johanne Héroux

« Outre les fonds nécessaires, il faut avoir une solide expérience du commerce de détail, idéalement dans le domaine de l’alimentation, étant donné qu’il s’agit d’un domaine complexe. Nous recherchons des gens passionnés, engagés, prêts à s’investir personnellement et à être présents dans la communauté. »

Julie Goulet, propriétaire d’un Provigo Le Marché à Aylmer, en Outaouais, depuis juillet, confirme que devenir franchisé ne se résume pas aux 50 000 $ investis. « Ce n’est pas juste l’argent, dit-elle au bout du fil. Quand tu achètes une franchise avec 190 employés, c’est aussi un investissement de temps, c’est un investissement personnel. Ce sont de grosses journées, si on veut être présent dans la collectivité, si on veut connaître tous les quarts de travail…

« Comme propriétaire, je ne veux pas être juste un nom sur une bâtisse. Je veux que le magasin reflète ma personnalité. Donc, c’est plus qu’un investissement financier. »

- Avec la collaboration de William Leclerc