(Calgary) Des employés d’un entrepôt d’Amazon dans le centre de l’Alberta pourraient devenir les premiers du détaillant au Canada à tenir un vote d’accréditation syndicale, et le syndicat à l’origine de la campagne affirme que ce ne sera pas le dernier.

La section locale 362 des Teamsters a indiqué mardi avoir déposé une demande de vote d’accréditation syndicale pour les employés de l’entrepôt d’Amazon à Nisku, juste au sud d’Edmonton. La Commission des relations du travail de l’Alberta doit vérifier la demande avant qu’une date ne soit fixée pour le vote, mais le syndicat s’attend à ce que celui-ci ait lieu d’ici la fin de l’année.

Selon les Teamsters, il s’agit de la première étape d’une campagne de recrutement visant à amener Amazon Canada à la table de négociations. Le syndicat dit qu’il a été en contact avec des travailleurs employés dans les installations d’Amazon à Vancouver, Calgary, Edmonton, Toronto, Milton, Cambridge et Kitchener.

« Nous avons des sections locales à travers le pays qui établissent des relations avec les travailleurs d’Amazon en ce moment même. La même chose se passe aux États-Unis », a affirmé le porte-parole de Teamsters Canada, Christopher Monette. « [Nisku] ne sera certainement pas le dernier [endroit]. »

Amazon Canada a annoncé lundi qu’elle embaucherait cet automne 15 000 employés dans ses entrepôts et centres de distribution à travers le pays, pour soutenir ses plans d’expansion au Canada.

L’entreprise a également indiqué qu’elle augmenterait le salaire de départ de ses employés de première ligne au Canada, qui s’établira désormais entre 17,00 $ et 21,65 $ par heure, comparativement au salaire de départ actuel de 16,00 $ par heure.

M. Monette a dit croire que ces augmentations de salaire étaient une réponse à la campagne de syndicalisation en cours. Mais il a ajouté que ces salaires restaient bien inférieurs aux 24,50 $ à 31,93 $ de l’heure que les employés d’entrepôt peuvent gagner dans des entreprises comparables syndiquées par des Teamsters.

Il a ajouté qu’Amazon avait également récemment aboli une prime de rendement mensuel qui valait entre 100 $ et 300 $ par mois, ce qui fait en sorte que certains travailleurs ne croient pas qu’ils recevront réellement un plus gros chèque de paye même avec l’augmentation de salaire.

Le rythme de travail exigeant et les questions de santé et de sécurité sont également une préoccupation, a ajouté M. Monette.

« Les travailleurs d’Amazon sont invités à ramasser un article chaque 9 à 12 secondes. C’est un rythme qui est difficile pour le corps », a-t-il expliqué. « Nous pensons simplement que les travailleurs d’Amazon méritent mieux, et Amazon a la capacité de traiter ses travailleurs de manière plus équitable. »

Un équilibre modifié par la pandémie

Amazon a la réputation d’étouffer les efforts des syndicats avant qu’ils ne puissent se propager. Une campagne de syndicalisation ratée en Alabama, ce printemps, a été la plus importante de l’histoire du géant du commerce en ligne. Ce n’était que la deuxième fois qu’un effort de syndicalisation au sein de l’entreprise aboutissait à un vote d’accréditation.

Cela signifie que les Teamsters auront probablement un combat difficile devant eux, a estimé Richard Powers, professeur agrégé à la Rotman School of Management de l’Université de Toronto.

« Je pense que ce sera [difficile], uniquement à cause de l’identité de ceux qu’ils affrontent », a souligné M. Powers. « Comme nous l’avons vu aux États-Unis, Amazon s’est donné beaucoup de mal pour empêcher les syndicats d’entrer. »

Malgré tout, M. Powers a ajouté que la pandémie de COVID-19 avait modifié l’équilibre des pouvoirs entre les employés et les employeurs. De nombreux employeurs des secteurs de la vente au détail, des services et de la logistique sont confrontés à des pénuries de main-d’œuvre alors que les travailleurs – exaspérés par les faibles salaires et les risques pour la santé associés à un éventuel contact avec le virus au travail – démissionnent en grand nombre.

« S’ils [les Teamsters] réussissent au Canada, cela leur donnera un énorme coup de pouce pour faire de même aux États-Unis », a affirmé M. Powers. « Les grands gagnants seront les employés, car Amazon va devoir réagir. »

Amazon Canada compte actuellement 25 000 employés à temps plein et à temps partiel dans 25 communautés, réparties dans cinq provinces. L’entreprise connaît une croissance rapide en raison de la pandémie de COVID-19 et de l’explosion des achats en ligne qui en a résulté. Le géant de la vente en ligne compte 46 entrepôts et installations logistiques et de livraison au Canada, comparativement à 30 à la mi-2020. D’autres annonces de croissance sont attendues plus tard cette année, selon la société.

Amazon n’a pas immédiatement répondu à une demande de commentaire mardi.

Lors d’une entrevue réalisée la semaine dernière, la directrice des activités de traitement des clients pour Amazon Canada, Sumegha Kumar, a affirmé que l’entreprise offrait un accès à des avantages sociaux en matière de santé, de soins dentaires et de soins oculaires, ainsi que des programmes de formation et d’éducation à tous les employés, indépendamment de leur poste ou de leur fonction.

Elle a ajouté que la décision de l’entreprise d’augmenter les salaires était un moyen de rester concurrentiel.

« Notre entreprise se développe beaucoup et nous voulons continuer à rester concentrés sur nos clients, nous avons donc évidemment des besoins en matière d’embauche et de rétention des meilleurs talents. »