(New York) L’éditeur américain de jeux vidéo Activision Blizzard, en pleine tempête après avoir été accusé d’avoir laissé s’installer discrimination et harcèlement au sein de l’entreprise, a annoncé mardi un remaniement au sein de la direction.

Le responsable de la filiale Blizzard Entertainment, J. Allen Brack, va quitter le groupe « pour poursuivre de nouvelles opportunités », a indiqué dans une lettre aux employés le directeur des opérations, Daniel Alegre, sans donner plus de justifications.  

Il est remplacé avec effet immédiat par Jen Oneal et Mike Ybarra, a-t-il ajouté en mettant en avant le « leadership », « l’empathie » et « le sens inébranlable des responsabilités » des deux nouveaux dirigeants.

M. Brack travaillait depuis 15 ans au sein de l’entreprise et y avait tenu divers rôles de direction.

Mais il était aussi directement nommé dans une plainte déposée fin juillet par une agence de l’État de Californie chargée d’enquêter sur les affaires en matière de droit civil, accusant le créateur de la superproduction « Call of Duty » d’avoir laissé s’installer une culture sexiste et toxique.

La direction a initialement cherché à rejeter en bloc les accusations détaillées dans la plainte, déclenchant l’ire de nombreux employés, qui ont signé en masse une pétition. Environ 200 personnes s’étaient aussi rassemblées dans le calme devant le siège de Blizzard Entertainment à Irvine, en Californie, le 28 juillet.

Les dirigeants avaient dans un premier temps affirmé que les accusations « ne représent(aient) pas l’environnement de travail d’Activision Blizzard aujourd’hui ».

Suite aux vives réactions, ils ont promis des mesures immédiates et des licenciements au sein du groupe.

« Donner l’exemple »

« Il n’y a aucune tolérance dans notre entreprise pour la discrimination, le harcèlement ou des traitements inégaux », a affirmé le directeur général de la société, Bobby Kotick, en préambule d’une conférence téléphonique avec des analystes mardi. « Nous allons devenir l’entreprise qui donnera l’exemple dans le secteur. »

En plus du remplacement de M. Brack par une équipe qui « s’assurera que Blizzard offre un lieu de travail accueillant, confortable et sans danger », « nous allons continuer à enquêter sur chacune des plaintes que nous recevons », a affirmé M. Kotick. « Les gens seront tenus responsables de leurs actions. »

L’industrie du jeu vidéo est régulièrement secouée par des scandales, ce secteur étant souvent considéré comme un milieu dominé par une culture d’entreprise masculine, où les dérives sexistes et comportements déplacés sont fréquents.  

L’entreprise française Ubisoft a par exemple été éclaboussée l’an dernier par de multiples révélations sur le comportement sexiste et violent de plusieurs de ses cadres.

En plus des accusations de sexisme et discrimination, l’agence californienne à l’origine de l’action en justice contre Activision lui reproche d’avoir échoué à traiter correctement les plaintes transmises par des employés aux ressources humaines ou à des responsables, y compris auprès de M. Brack.

Bobby Kotick avait assuré, dans une lettre envoyée la semaine dernière aux employés, que le groupe allait « immédiatement évaluer les cadres et dirigeants de l’entreprise ».

Parmi les autres mesures présentées par le patron d’Activision Blizzard figuraient aussi le recrutement d’un cabinet d’avocats pour évaluer la politique de l’entreprise en matière d’inclusion et la promesse d’embauches plus diversifiées dans l’entreprise.

Les femmes y représentent actuellement environ 20 % des salariés.

Celles interrogées « ont presque toutes confirmé que travailler pour (Activision) équivalait à évoluer dans un “club de garçons” », impliquant « invariablement des hommes buvant de l’alcool et soumettant les femmes à du harcèlement sexuel sans conséquence pour eux », détaille le texte de la plainte qui a été déposée le 20 juillet devant la justice californienne.

Activision a prévenu mardi que les déboires liés à la plainte pourraient peser sur ses activités.

« Si nous subissons des périodes prolongées de publicité négative, une productivité considérablement réduite ou d’autres conséquences négatives liées à cette affaire, nos activités vont probablement en être affectées », a souligné le groupe.

Porté par ses superproductions « Call of Duty », « World of Warcraft » et « Candy Crush », le chiffre d’affaires de l’entreprise a en attendant progressé de 19 % au deuxième trimestre à 2,3 milliards de dollars. Son bénéfice net est en hausse de 51 %, à 876 millions de dollars.

Et l’éditeur de jeux vidéo a dans la foulée relevé légèrement sa prévision de chiffre d’affaires pour l’ensemble de l’année.