L’entreprise a retrouvé « la rentabilité au mois de juin »

Tandis que les mauvaises nouvelles se multiplient dans l’industrie de la mode, La Maison Simons a réussi à se sortir la tête de l’eau. Dans des lettres transmises à ses fournisseurs et à ses employés, le président annonce que la rentabilité est de retour et qu’aucune restructuration n’est envisagée.

Ceux qui craignent pour l’avenir du détaillant Simons peuvent dormir tranquilles, si l’on se fie aux propos du président dans trois lettres qu’a obtenues La Presse.

L’une, transmise aux fournisseurs le 27 juillet, affirme que l’entreprise a retrouvé « la rentabilité au mois de juin », grâce à des revenus plus élevés qu’anticipés, notamment. Peter Simons annonce même à ses fournisseurs un retour « aux conditions de paiement contractuelles régulières qui étaient en vigueur en janvier 2020 », et ce, dès le 1er août.

« J’ai envoyé le message au siège social en Turquie avec des bonshommes sourire ! C’était la plus belle nouvelle depuis le 17 mars. Notre domaine est difficile, il nous fallait une bonne nouvelle », raconte Renée Mathieu, représentante pour Mavi Jeans dans l’est du Canada. Simons, son plus important client, lui achète des jeans depuis 21 ans, et c’était la première fois que les modalités de paiement étaient allongées.

Dans sa lettre, Peter Simons précise que tous les comptes fournisseurs « sont actuellement à jour » et que, s’il a pu tenir le coup le printemps dernier, c’est grâce au soutien et aux encouragements de ses fournisseurs, à qui il exprime chaleureusement sa reconnaissance.

« Mon grand-père, qui a guidé Simons lors des deux guerres mondiales, la grippe espagnole et la Grande Dépression, disait : “Prenez soin de vos fournisseurs exactement comme vous prenez soin de vos clients”. Il avait raison. Merci encore pour votre soutien. »

En vacances, Peter Simons n’a pu être joint, et personne d’autre au siège social n’est autorisé à parler au nom du détaillant. Toutefois, un membre de la haute direction nous a confirmé l’authenticité de la lettre reçue par les fournisseurs.

Printemps parsemé d’embûches

Le ton du grand patron était beaucoup plus empreint d’inquiétude, au début de mai, quand tous ses magasins étaient fermés et qu’aucune date de réouverture n’était connue. En entrevue avec Bernard Drainville, au 98,5 FM, il n’avait pas caché que c’était « tough ».

« Oui, j’ai peur [de ne pas passer au travers]. C’est épeurant comme situation, on ne connaît pas l’avenir […]. Oui, j’ai peur, mais la peur, ce n’est pas mauvais, ça fait de l’adrénaline, et si on sait gérer notre état mental, on peut convertir la peur en focus », avait-il confié.

Quand la COVID-19 a frappé, Simons était sur le point de mettre en marche son nouveau centre de distribution automatisé, le plus important investissement de son histoire.

« Je dors sur un actif mort de quasiment 200 millions […] ; la dette est au rendez-vous, c’est la productivité qui ne l’est pas », avait-il aussi dit au Journal de Québec.

De plus, la vente de son ancien centre de distribution lui a échappé. « L’acheteur a reculé trois jours avant la fermeture des magasins. Je le comprends, a-t-il dit au 98,5. Mais il y a un bout où ça n’arrêtait pas. J’étais à terre, et le monde me donnait des coups de pied. »

L’automne un peu plus tard

Deux communications transmises aux employés de Simons à la fin de juillet indiquent que la situation s’est beaucoup améliorée, malgré certains défis.

« Même si nous avons encore un déficit financier à surmonter, je suis très optimiste et je vous tiendrai au courant dès qu’un arrangement sera confirmé avec nos créanciers », écrit Peter Simons, avant d’ajouter qu’il n’a « aucunement l’intention de restructurer ou d’entreprendre des poursuites judiciaires de quelque nature ».

Parmi ses concurrents, Reitmans, Tristan, Laura, Lolë, Jack & Jones et Frank & Oak se sont placés à l’abri de leurs créanciers pour se restructurer.

Le dirigeant dit « adorer » ses équipes, son réseau de magasins, ses investissements dans le commerce électronique, dans la robotique et la stratégie omnicanal. « Les quatre derniers mois n’ont fait que renforcer ma conviction que nous avons adopté la bonne stratégie à long terme. »

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Peter Simons encourage ses troupes à prendre « grand soin de chaque client » qui se présente en magasin.

Peter Simons dit voir « la lumière au bout du tunnel » et encourage ses troupes à prendre « grand soin de chaque client » qui se présente en magasin.

Les écrits du grand patron nous apprennent aussi que les livraisons d’automne ont été reportées dans un souci de préservation des liquidités. Cela laissera plus de temps aux magasins pour écouler les collections printemps-été.

Quand c’était possible, des commandes ont aussi été annulées. « Dans certaines [catégories], nous sommes allés trop loin en raison de projections trop pessimistes », note le dirigeant, si bien que l’entreprise s’est retrouvée avec des ruptures de stock. La situation sera corrigée « en août, septembre, lors des nouveaux arrivages ».

« Une crise est simplement l’occasion d’être exceptionnel. Alors, soyons exceptionnels », conclut Peter Simons.