(Londres) Le géant des hydrocarbures Royal Dutch Shell a annoncé jeudi une perte nette abyssale de 18,1 milliards de dollars US au deuxième trimestre, du fait d’énormes dépréciations d’actifs reflétant un marché pétrolier déprimé par la pandémie.

Le groupe anglo-néerlandais, qui avait dégagé un bénéfice net de 3 milliards de dollars un an plus tôt, explique dans un communiqué avoir passé dans ses comptes trimestriels une charge de 16,8 milliards de dollars, dont il avait déjà dévoilé l’ampleur fin juin.

Shell, comme son concurrent BP, a choisi de passer cette énorme dépréciation sur un seul trimestre pour l’heure, quitte à publier une perte monstre.

Le groupe a été contraint de réviser à la baisse la valeur de ses actifs compte tenu de la faiblesse durable des prix du pétrole en raison d’une demande laminée par la crise sanitaire.

Les cours du pétrole se sont effondrés à partir de mars, passant même brièvement en négatif en avril avant de se reprendre pour le reste du deuxième trimestre, pour tourner désormais autour de 40 dollars, un niveau bien inférieur à celui observé l’an passé.

Non seulement la demande est plombée par la crise économique liée à la pandémie, mais l’offre reste abondante malgré les efforts des pays de l’OPEP et de ses alliés comme la Russie de réduire leur production pour soutenir les prix.

Au premier trimestre, Royal Dutch Shell était déjà tombé dans le rouge à cause du plongeon des cours du brut, ce qui l’avait conduit à réduire son dividende pour la première fois depuis les années 1940.  

Au deuxième trimestre, sa production a reculé de 6 % à 3,4 millions de barils de pétrole par jour.

En revanche, ses performances financières sont moins catastrophiques hors éléments exceptionnels avec un bénéfice net en chute de 82 % à 638 millions de dollars certes, mais plus élevé que prévu.

Le titre réagissait peu en Bourse. Il était en baisse de 1,88 % vers 5 h 20 à Londres, à l’image du marché dans son ensemble.

« Shell a pris des décisions rapides. Les cessions d’actifs déjà annoncées, la baisse des dépenses opérationnelles et des investissements, ainsi que du dividende, ont permis de dégager 30 milliards de dollars », estime Richard Hunter, analyste chez Interactive Investor.

Des suppressions d’emplois ?

Pour le troisième trimestre, le groupe s’attend à une baisse de sa production, notamment en raison des mesures prises par l’OPEP et il prévoit encore un impact négatif de la faible demande pour le pétrole et le gaz.

Shell, qui a mis à l’arrêt son énorme programme de rachats d’actions, avait déjà dit fin mars qu’il comptait réduire de 5 milliards de dollars ses dépenses d’investissements, à 20 milliards.

Le groupe avait par ailleurs indiqué que ses coûts seraient réduits de 3-4 milliards de dollars au cours des 12 prochains mois.

Son concurrent BP a également annoncé un plan d’économies qui passera par la suppression de 10 000 emplois.

Le directeur général de Shell Ben van Beurden a laissé entendre jeudi lors d’une conférence téléphonique qu’il y aurait des suppressions de postes au sein du groupe qui compte 83 000 salariés.

« Nous allons probablement revoir notre taille et nous aurons moins de collaborateurs […] Nous verrons après l’été quel est l’impact sur nos effectifs », a-t-il dit.

Il a précisé avoir déjà mis en place des départs volontaires et réduit le nombre de postes d’expatriation.