En raison de la pandémie, Hydro-Québec met un frein à ses ambitions internationales et consacrera plutôt ses efforts à la relance économique du Québec.

« Je vois mal comment on pourrait prendre 5 milliards pour investir au Chili en ce moment, affirme Jean-Hugues Lafleur, vice-président et chef de la direction financière d’Hydro-Québec. Si j’ai 5 milliards, ça va être investi au Québec. »

La société d’État rapporte une baisse de ses profits pour le trimestre d’hiver 2020, des résultats prépandémie qui annoncent que le pire est à venir. « Le ralentissement économique découlant de la crise actuelle nous force en effet à anticiper une diminution des ventes d’électricité sur tous nos marchés », prévient Jean-Hugues Lafleur, qui annonce en même temps une révision à la baisse des prévisions déjà faites pour la période 2020-2024.

Le bénéfice net des trois premiers mois de l’année a été de 1,5 milliard, en baisse de 249 millions comparativement à la même période l’an dernier. La consommation d’électricité a baissé au Québec, en raison des températures moins froides que l’an dernier, et les ventes à l’exportation ont diminué.

La situation économique s’étant beaucoup détériorée depuis la fin du trimestre, le 31 mars, Hydro-Québec prévoit que ses ventes continueront de reculer au Québec comme sur les marchés d’exportation. Les exportations ont rapporté 91 millions de moins, en raison d’une demande plus faible et des prix plus bas sur le marché. Hydro-Québec a obtenu un prix moyen de 4,9 cents par kilowattheure exporté, comparativement à 5,1 cents le kilowattheure l’an dernier.

Depuis le 31 mars, le prix de l’électricité sur les marchés hors Québec a continué de dégringoler, a indiqué M. Lafleur. Actuellement, le prix est aussi bas que 1,5 cent US le kilowattheure aux États-Unis, a-t-il précisé.

Hydro utilise des outils financiers pour atténuer l’impact de la variation du prix du marché aux États-Unis. Sans ces outils, elle aurait obtenu seulement 2,2 cents le kilowattheure par kilowattheure exporté plutôt que 4,9 cents.

Au prix actuel, il n’est pas intéressant d’exporter, selon Jean-Hugues Lafleur. « On préfère emmagasiner l’eau dans nos réservoirs et vendre quand les prix seront plus intéressants. » C’est la faiblesse de la demande, conjuguée à l’abondance de gaz naturel, qui expliquent le prix très faible de l’électricité sur le marché de gros américain.

Aucune amélioration n’est attendue au deuxième trimestre, qui prendra fin le 30 juin, a indiqué M. Lafleur. Pour la seule période du 13 mars au 13 mai, la consommation d’électricité au Québec est en baisse de 5 %, ce qui a privé Hydro de 81 millions de revenus.

Selon lui, la situation est particulièrement difficile dans le secteur des pâtes et papier, un des gros clients industriels d’Hydro-Québec.

Sur les marchés hors Québec, la demande a diminué de 6 à 9 %. Les baisses les plus importantes viennent de l’Ontario (-10 à -12 %), de l’état de New York (-8 %) et de la Nouvelle-Angleterre (-3 à -5 %).

Hydro-Québec prévoit aussi une baisse de ses investissements en 2020, en raison du ralentissement de l’activité sur les chantiers causé par la pandémie. L’entreprise investit bon an mal an 4 milliards de dollars.

De même, la prévision de bénéfice net de 2,9 milliards ne tient plus, a fait savoir M. Lafleur. « Je vois mal comment on va être en mesure de l’atteindre », a-t-il dit.

Les états financiers d’Hydro-Québec pour le premier trimestre sont les premiers signés par sa nouvelle présidente-directrice générale, en poste depuis le 6 avril. « Nous nous souviendrons longtemps du printemps 2020 », dit Sophie Brochu dans son message d’introduction.

Parmi ses projets pour la suite des choses, elle énumère l’élimination de la consommation inutile, la production d’électricité décentralisée, le développement des batteries et de la domotique, ainsi que la production d’hydrogène vert.