(Montréal) Environ trois mois après avoir retiré ses dernières billes dans le Cirque du Soleil, son fondateur, Guy Laliberté, laisse entendre qu’il pourrait s’impliquer dans le sauvetage de l’entreprise de divertissement actuellement sur la corde raide en raison de la pandémie de la COVID-19.

Par l’entremise d’une lettre ouverte publiée mercredi dans laquelle il dit vouloir partager ses réflexions à l’aube de semaines qui s’annoncent « cruciales » l’homme d’affaires prévient que les investisseurs qui participeront à la relance devront être « patients » et résister à la tentation de repartir la machine trop rapidement.

« À quelques jours de la date limite d’inscription pour le combat royal, j’en suis à décider si je reprends mon nom de lutteur afin de sauter dans l’arène », écrit M. Laliberté, à la fin de sa missive qui dresse une série d’allusions à l’univers de la lutte.

M. Laliberté, qui n’était pas disponible pour accorder des entrevues, a identifié quelques catégories de prétendants à la relance du Cirque : les actionnaires actuels, les détenteurs de dettes ayant financé la compagnie, les paliers de gouvernement, des « grands joueurs du monde du divertissement » ainsi que des « requins » qui rêvent d’acquérir la société pour une « bouchée de pain ».

L’homme d’affaires avait cédé sa participation restante de 10 % dans le Cirque à la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ) en février dernier. Le montant de la transaction n’avait pas été dévoilé, mais la valeur de ce bloc d’actions était estimée à bien plus de 100 millions.

Traînant une dette de plus de 900 millions US, le Cirque vient d’obtenir un financement d’urgence de 50 millions US auprès de ses trois principaux actionnaires — TPG Capital (60 %) la société chinoise Fosun (20 %) et le bas de laine des Québécois (20 %). En plus d’étudier tous les scénarios, y compris celui où elle se placerait à l’abri de ses créanciers, la compagnie a commencé ses démarches afin de dénicher un investisseur, acquéreur ou de renégocier une autre injection de capitaux auprès de ses propriétaires actuels.

S’il revenait dans le portrait quelques mois seulement après avoir vendu sa participation en février, au moment où le Cirque avait interrompu ses spectacles en Chine en raison de la COVID-19, M. Laliberté n’aurait-il pas le même comportement que les « requins » qu’il évoque dans sa lettre ?

« En vendant (sa participation) en février, il ne pouvait, pas plus que quiconque d’ailleurs, prédire que le Cirque cesserait ses activités un moins plus tard en raison de la pandémie, a indiqué dans un courriel Anne Dongois, chef des communications pour Guy Laliberté. Comme fondateur, il est forcément touché par la situation actuelle. »

Au moment de licencier 4679 employés, soit 95 % de son effectif, le 19 mars dernier, en raison de la pandémie de la COVID-19, le Cirque avait également annulé ses 44 spectacles à travers le monde. Du jour au lendemain, la compagnie avait ainsi perdu la quasi-totalité de ses recettes générées grâce à la vente de billets.

La semaine dernière, le président et chef de la direction du Cirque, Daniel Lamarre, avait affirmé, au cours d’une entrevue avec La Presse canadienne, qu’à sa connaissance, rien ne laissait croire que M. Laliberté envisageait de sauter dans l’arène afin de sauver l’entreprise qu’il a fondée en 1984.

« Il (Guy) a ses propres projets, avait dit M. Lamarre. Il est très occupé avec ses activités de Lune Rouge (qui investit dans des entreprises technologiques, les arts et l’immobilier), alors pour l’instant, je pense que c’est sa priorité. »

Jusqu’à présent, Québecor a manifesté un intérêt à l’endroit du Cirque, disant vouloir participer à un sauvetage de la compagnie avant d’injecter des « centaines de millions » afin de rapatrier l’actionnariat au Québec. Le conglomérat de télécommunications contrôlé par Pierre Karl Péladeau n’avait toutefois pas encore eu accès aux livres financiers de l’entreprise de divertissement.