Le coronavirus n’aurait pu intervenir à un pire moment dans l’année pour Chocolats Favoris : la fête de Pâques est celle qui génère les plus importantes ventes de chocolat dans l’année. Mais son propriétaire, Dominique Brown, est « content » parce qu’il réussira, calcule-t-il, à réaliser 30 % du chiffre d’affaires qu’il avait anticipé.

« Je pensais que ce serait bien pire ! confie l’entrepreneur au bout du fil. Alors je suis positif. On est super contents. »

Grand optimiste, Dominique Brown refuse de se laisser abattre ou de s’apitoyer sur son sort. « On a la chance d’être encore ouverts », insiste-t-il, tout en prenant soin de définir le mot « ouvert ».

Depuis début mars, 28 chocolateries sur 49 sont « encore actives », c’est-à-dire qu’un maximum de cinq employés s’y rend pour préparer des commandes tout en respectant scrupuleusement les règles de distanciation sociale. Mais aucun client n’est admis. Les portes sont verrouillées.

Ces commandes peuvent être récupérées sans contact grâce à un service à l’auto lancé en quelques jours, être livrées à domicile sans contact ou être récupérées par Uber Eats, qui fait le pont avec le destinataire ultime du dessert ou du chocolat de Pâques.

PHOTO DAVID BOILY, ARCHIVES LA PRESSE

Dominique Brown, propriétaire de Chocolats Favoris

Une partie du siège social dans le parc industriel Armand-Viau, à Québec, a aussi été convertie en centre d’appels pour prendre les commandes. Le chocolat est souvent offert à Pâques en cadeau par des grands-parents qui ne sont pas nécessairement à l’aise avec l’achat en ligne, explique Dominique Brown.

« Ça a permis de ramener du monde au travail, de conseiller les clients au téléphone, de leur faire des suggestions, de répondre aux questions. Et ça nous a permis de décharger les magasins. »

Un retard de production bénéfique

Puisque les ventes de chocolat de Pâques de Chocolats Favoris diminueront vraisemblablement de 70 % par rapport aux prévisions, qu’adviendra-t-il de tous ces sympathiques lapins, licornes et dragons invendus qu’on imagine très nombreux ?

Une partie pourra être fondue pour devenir autre chose. Mais dans certains cas, cela n’est pas possible, explique Dominique Brown.

Il ne prévoit pas pour autant organiser une grande liquidation de ses stocks en ligne. « C’est rare qu’on fait des soldes », dit-il, tout en étant conscient qu’une situation exceptionnelle, ça change les habitudes.

IMAGE TIRÉE DU SITE INTERNET DE CHOCOLATS FAVORIS

Des chocolats de la collection de Pâques 2020 de Chocolats Favoris

La « bonne » nouvelle, poursuit-il, c’est que les stocks de figurines de Pâques n’étaient pas aussi élevés qu’ils auraient dû l’être lorsque la crise a éclaté. « On avait pris un peu de retard… »

Et dès que le coronavirus est devenu le sujet de l’heure, la décision de cesser la production a été prise. « Donc, il y a un pourcentage de production qui n’a pas été fait. On espère finir avec un niveau d’inventaire gérable. »

Assumer le pire dès le premier jour

L’entrepreneur raconte que lorsque le premier ministre François Legault a déclaré l’état d’urgence sanitaire, il a immédiatement « créé une cellule d’urgence et assumé le pire des scénarios, soit la fermeture complète » de toutes les chocolateries.

Il n’était déjà plus question d’ouvrir au public. Puisque les clients ont l’habitude de se rassembler pour manger une crème glacée molle trempée dans le chocolat, c’était trop risqué. Même si Québec a permis aux restaurateurs d’ouvrir avec 50 % moins de places.

Une semaine plus tard, quand la fermeture des restaurants a été ordonnée par M. Legault, Chocolats Favoris lançait son service à l’auto.

« On se disait que ce serait le fun d’avoir un service au volant, mais on n’en avait pas. Alors on s’est demandé comment s’en patenter un », raconte l’homme d’affaires en précisant que toutes ses chocolateries – sauf exception – ont pignon sur rue et possèdent un stationnement.

En s’inspirant de Postes Canada, on a aussi commencé à proposer la livraison à domicile sans contact. Le livreur appelle le client en arrivant devant sa porte et dépose le paquet. On a aussi fait appel aux services d’Uber Eats. « D’autres services de livraison vont s’ajouter », annonce Dominique Brown, qui se prépare par ailleurs à lancer de nouveaux produits.

« C’est certain que ce n’est pas la crise qui va nous en empêcher ! », conclut celui qui s’attaquera aussi à la création d’un plan de relance la semaine prochaine.

Vadeboncœur épargnée

L’entreprise montréalaise Vadeboncœur, qui fabrique les marques de chocolat Freddo et Arvisais – vendues principalement dans les pharmacies et les supermarchés –, a plus de chance que Chocolats Favoris. Le coronavirus « n’a pas vraiment eu d’impact. On produit dès le mois d’août ou septembre et on livre aux détaillants en janvier et février », relate la copropriétaire Angela Conte. Vadeboncœur a par ailleurs créé un site transactionnel début mars pour y vendre ses produits, dont trois ensembles de Pâques. Pour ce qui est des ventes en magasin de ses créations, la femme d’affaires dit qu’elle ne saura que la semaine prochaine si les baisses ont reculé, car « ça s’achète à la dernière minute ».

Jean Coutu livre des lapins

Les pharmacies Jean Coutu ont transmis un courriel à leurs clients mercredi les avisant que la livraison à domicile de chocolat de Pâques était désormais offerte. « Nouveau service de commande express en succursale », précisait-on. Le processus est rudimentaire, mais efficace. On inscrit ce qu’on souhaite acheter dans le formulaire fourni (parmi les 55 produits illustrés) et on le transmet à sa pharmacie. Nous avons fait l’expérience et après deux heures à peine, on sonnait à la porte ! Une solution pratique pour les grands-parents qui veulent gâter leurs descendants.