Même s’il a cédé sa place à la tête de SNC-Lavalin en juin dernier, alors que la firme d’ingénierie et de construction était confrontée à des déboires judiciaires et opérationnels, Neil Bruce a tout de même eu droit à un traitement de quelque 7 millions en 2019.

Il a même eu droit à plus d’un demi-million de dollars en frais de remboursement pour couvrir son déménagement de Montréal vers le Royaume-Uni afin d’y rejoindre sa famille. De l’autre côté de l’Atlantique, il a continué à conseiller le conseil d’administration jusqu’au 31 décembre, avant de quitter définitivement.

Ces informations figurent dans la circulaire de sollicitation envoyée aux actionnaires de la multinationale québécoise en vue de son rendez-vous annuel du 7 mai, qui sera entièrement virtuel en raison des risques associés à la pandémie de la COVID-19.

Le départ de M. Bruce avait été présenté comme un départ à la retraite. Il avait été remplacé par Ian Edwards, auparavant chef de l’exploitation.

« M. Bruce n’a pas reçu d’indemnité de cessation d’emploi à la suite de sa retraite », a souligné SNC-Lavalin, dans le document, en précisant que son contrat avait été modifié le 11 juin dans la foulée de l’annonce de sa retraite.

En cas de « cessation d’emploi sans motif valable », l’ex-président aurait eu droit à une indemnité de départ de 14 millions.

M. Bruce — dont la paye totale a été de 5,44 millions en 2018 — a touché un salaire de base d’environ 1,3 million CAN, après conversion des sommes versées en livres sterling. Ses attributions fondées sur des actions ont totalisé 4,1 millions. Il a aussi reçu une prime d’environ 670 000 $ et une « autre rémunération » de 890 701 $ — qui tient compte de ses frais de déménagement.

« On peut aller vivre là où l’on veut, mais est-ce que l’entreprise était obligée de payer son déménagement (à M. Bruce) ? » s’est notamment demandé l’expert en gouvernance et professeur à l’Université Concordia Michel Magnan, au cours d’un entretien téléphonique.

« À moins que cela ne figure dans son contrat d’embauche, cela donne l’indication qu’il y a eu une entente de gré à gré. »

À titre de comparaison, le salaire global d’Alexandre L’Heureux, président et chef de la direction de WSP Global — la rivale québécoise de SNC-Lavalin — s’est également établi à 7 millions l’an dernier, d’après les documents déposés auprès des autorités réglementaires.

Moins élevé

M. Edwards, qui a été confirmé dans ses fonctions à la fin octobre, a eu droit à un salaire global de 3,7 millions, ce qui tient compte notamment d’une rémunération de base de près de 950 000 $, d’attributions fondées sur des actions de 1,9 million et d’une prime annuelle de 531 556 $.

En comptabilisant la rémunération globale de M. Bruce, la paye totale des cinq principaux dirigeants de SNC-Lavalin a atteint 21 millions l’an dernier.

Sous la gouverne de M. Edwards, SNC-Lavalin a décidé de cesser de soumissionner sur des contrats à prix fixe, dans lesquels les dépassements de coûts sont absorbés par l’entrepreneur, afin de se tourner davantage vers les services d’ingénierie, où les risques sont moins élevés.

Après plusieurs années à plaider sans succès pour une entente à l’amiable avec les autorités fédérales afin de mettre de côté les accusations criminelles qui pesaient sur elle, l’entreprise a pu, en décembre dernier, tourner la page sur une partie de son passé trouble.

La division de construction de la firme a alors plaidé coupable à une accusation de fraude pour des gestes posés en Libye entre 2001 et 2011. Ce plaidoyer s’est accompagné d’une amende de 280 millions et de l’abandon d’une série d’accusations.