Le gouvernement canadien dépensera 71 milliards sous forme de subventions salariales au cours des trois prochains mois. Voici comment ça fonctionnera.

Je suis restaurateur. Je suis fermé par ordre du gouvernement. Que dois-je faire ?

Pour profiter des subventions salariales, il faut s’inscrire à l’Agence du revenu du Canada dès que le portail ou dès que l’application sera disponible. Ce qui devrait être une question de jours. Il faut que vos revenus de mars 2020 soient d’au moins 30 % inférieurs à ce qu’ils étaient en mars 2019 à cause du virus. Si c’est le cas, vous allez indiquer à l’ARC combien vos employés gagnaient par semaine avant le 15 mars. L’Agence vous transférera par dépôt direct ou par chèque 75 % du salaire hebdomadaire jusqu’à un maximum de 847 $ par employé, somme que vous devez remettre à vos employés. Vous pouvez demander moins que 75 % si vous le désirez. Le programme est rétroactif au 15 mars.

C’est tout ?

Il faut faire la demande chaque mois. La comparaison se fera sur mars 2020 par rapport à mars 2019, avril 2020 par rapport à avril 2019, etc. Le programme est d’une durée de trois mois : mars, avril et mai. En conférence de presse, le ministre des Finances du Canada, Bill Morneau, n’excluait pas de le prolonger en cas de besoin. Pour 3 mois, le coût du programme est estimé à 71 milliards. C’est assez pour subventionner le salaire d’un minimum de 6,5 millions de Canadiens.

Est-ce que la subvention sera imposable ?

Oui, elle est imposable dans les mains de l’entreprise comme toute autre contribution du gouvernement. Mais encore faut-il que l’employeur fasse des profits en 2020. Pour ce qui est de l’employé, la contribution prend la forme d’un salaire, évidemment imposable et assujetti aux déductions à la source habituelles.

Quand vais-je recevoir la subvention ?

Dans les trois à six semaines, promet le gouvernement, ce qui nous mène à la mi-mai.

C’est long. Comment vais-je me rendre jusqu’à la mi-mai ?

« Les entreprises ont besoin de liquidités dans un délai plus rapide que six semaines si elles veulent pouvoir maintenir le lien d’emploi avec leurs travailleurs qualifiés. Le premier ministre Justin Trudeau et le ministre Bill Morneau envoient un message aux entrepreneurs de réembaucher la main-d’œuvre mise à pied temporairement, mais pour que ce soit possible rapidement, les sommes doivent arriver dans un délai plus court », a réagi Charles Milliard, président-directeur général de la Fédération des chambres de commerce du Québec, dans un communiqué. En conférence de presse, le ministre Morneau a suggéré aux PME admissibles de se servir du nouveau programme Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes pour obtenir de leur institution financière un prêt sans intérêt de 40 000 $, dont 10 000 $ seront graciés si le prêt est remboursé rapidement. Pour être admissibles, ces organisations doivent démontrer qu’elles ont versé de 50 000 $ à 1 million en salaires en 2019.

Mon entreprise n’existait pas en mars 2019, ai-je tout de même droit aux subventions ?

Oui, le critère important du gouvernement, c’est que l’entreprise ait subi une baisse d’au moins 30 % de ses revenus à cause de la COVID-19. Le point de référence peut varier si la comparaison avec le mois de l’année 2019 est impossible, ont assuré les hauts fonctionnaires des Finances lors d’un breffage technique à l’intention des médias.

Quelles entreprises, au juste, ont droit à la subvention salariale de 75 % ?

À peu près toutes, du moment que ladite entreprise a subi une baisse de 30 % de ses revenus. Ça rend admissibles les filiales de multinationales, les sociétés cotées en Bourse ayant ou non plein d’argent en banque, les PME, les entreprises enregistrées, les sociétés en commandite, les organismes de charité et les organismes sans but lucratif.

Est-ce que des limitations s’appliquent pour les sociétés cotées en Bourse, pour éviter qu’elles n’en profitent pour verser des dividendes avec l’argent public ou pour racheter leurs actions dont le cours est déprimé ?

En une heure de conférence de presse avec le ministre et une autre heure de breffage technique avec les fonctionnaires, il n’a jamais été question de ce genre de limitations. Le critère principal demeure la baisse de revenus de 30 %. La subvention salariale doit servir à payer des salaires, et rien d’autre. Les fraudeurs qui détournent l’argent seront punis sévèrement par le fisc. Les détails seront dévoilés prochainement concernant cet aspect. Il semble que l'employeur doit prouver de façon formelle au gouvernement qu'il fait tout en son possible pour payer les 25 % de salaire qui restent à ses employés, s'il en est capable.

Je pensais m’inscrire au programme de subvention salariale de 10 % qui avait d’abord été annoncé. Maintenant, je veux 75 %. Qu’est-ce qu’il advient du programme de subvention salariale de 10 % ?

Les deux programmes, tous deux administrés par Revenu Canada, vont cohabiter, assurent les fonctionnaires des Finances. Le programme de 10 % s’applique seulement aux PME et n’a pas la baisse de revenus de 30 % comme critère. Ça peut intéresser les entreprises qui n’ont pas vu leurs revenus baisser tant que ça.

Le gouvernement va subventionner quasiment toutes les entreprises au pays, ça va coûter la totale ?

Effectivement, le nouveau programme va coûter 71 milliards en 3 mois. Toutefois, une partie des travailleurs qui vont profiter de la subvention salariale allaient toucher la prestation canadienne d’urgence (PCU) à la place. De fait, le gouvernement Trudeau, qui prévoyait dépenser 40 milliards en PCU, revoit ce montant à la baisse, à 24 milliards. Le programme de subvention salariale de 75 % va aussi rendre moins coûteux le premier programme de subventions salariales de 10 %. Au départ, le gouvernement prévoyait dépenser 4 milliards pour ce premier programme ; cette somme est désormais revue à 1 milliard.