(New York) Facebook continue à attirer en masse les utilisateurs et les revenus malgré les multiples polémiques auxquelles le groupe fait face, sans que cela suffise aux yeux des marchés et au prix d’une envolée de ses dépenses.

Le titre chutait d’environ 7 % jeudi dans les échanges électroniques précédant l’ouverture de la Bourse.

Attaqué de toutes parts, sur la gestion des données privées de ses membres ou de la parole des responsables politiques par exemple, le géant des réseaux sociaux a encore vu le nombre d’utilisateurs mensuels actifs sur Facebook augmenter au quatrième trimestre de 8 % sur un an pour atteindre 2,5 milliards fin 2019.

Le nombre de membres utilisant au moins une fois par mois le réseau social ou les applications Instagram, WhatsApp et Messenger, a de son côté grimpé de 9 %, à 2,89 milliards.

Cette progression continue est importante, le modèle économique de Facebook reposant sur l’exploitation des données personnelles de ses membres, qu’il collecte et compile pour proposer aux annonceurs de cibler au mieux les consommateurs.

Les résultats financiers ont suivi : le groupe a gagné 7,3 milliards de dollars d’octobre à décembre, une somme en hausse de 7 % sur un an, et a vu son chiffre d’affaires bondir de 25 % à 21,1 milliards de dollars entre octobre et décembre.  

Cette croissance est toutefois un peu moins importante qu’au cours des précédents trimestres. Et Facebook anticipe pour le premier trimestre un nouveau ralentissement de l’ordre de 1 % à 5 %.

L’entreprise atteint un certain seuil de maturité ne permettant plus de prolonger indéfiniment la croissance frénétique des dernières années, a souligné le directeur financier David Wehner, lors d’une conférence téléphonique. Elle subit aussi « l’impact grandissant des diverses réglementations sur la vie privée dans le monde » ainsi que « d’autres obstacles au ciblage des publicités ».

Litige sur la reconnaissance faciale

Le montant des dépenses du réseau social s’est parallèlement envolé, de 34 % à 12,2 milliards de dollars au quatrième trimestre, de 51 % à 46,7 milliards de dollars sur l’année, faisant pression sur les marges de l’entreprise.  

Facebook a lourdement investi depuis 2018 pour rétablir la confiance, depuis des scandales de fuites de données et de campagnes de désinformation menées sur ses plateformes.

Dernière polémique en date : le groupe a accepté de payer 550 millions de dollars pour mettre fin à un litige dans l’Illinois sur des abus dans l’utilisation de la reconnaissance faciale, ce qui a fait bondir ses dépenses administratives de 87 %, a indiqué mercredi M. Wehner.  

« Nous avons décidé de rechercher un accord dans le meilleur intérêt de notre communauté et de nos actionnaires pour évacuer ce problème », a ajouté le groupe par la suite, cité par l’agence Bloomberg.

« Le fait que le chiffre d’affaires et le bénéfice par action n’aient dépassé que de peu les prévisions a pu décevoir des investisseurs habitués à des performances plus flamboyantes », avance Colin Sebastian du cabinet Baird pour expliquer la chute du titre en Bourse.

Pourtant, avec ses derniers chiffres trimestriels, « l’entreprise démontre qu’elle résiste à la critique permanente de ses pratiques tout en continuant à faire croître ses revenus et sa base d’utilisateurs », remarque Debra Aho Williamson, analyste chez eMarketer.

Cette tendance ne faiblira pas en 2020, anticipe le cabinet qui prévoit une nouvelle croissance des dépenses publicitaires de 22 % sur Facebook et Instagram.  

Le groupe de Menlo Park enchaîne pourtant les controverses, de son projet de monnaie numérique Libra qui a suscité une large hostilité, aux questions de respect de la vie privée en passant par des accusations de pratiques anticoncurrentielles et de désinformation.  

Le groupe a encore, début janvier, fait fi des critiques et confirmé qu’il ne censurera que très exceptionnellement les publicités politiques, même mensongères.

À l’approche de l’élection présidentielle américaine en novembre, M. Zuckerberg a répété mercredi que les entreprises privées ne devaient pas, à ses yeux, décider seules « quels contenus sont nuisibles ».

« Nous étions en retard en 2016 », a-t-il reconnu. « Mais après avoir travaillé sur la protection d’élections à travers le monde, de l’Union européenne à l’Inde en passant par le Mexique et les élections législatives de mi-mandat aux États-Unis, nous pensons que nos systèmes sont maintenant les plus avancés », a affirmé le milliardaire.