(Calgary) L’entente qui verra Cenovus Energy acquérir Husky Energy, une opération évaluée à environ 3,8 milliards, entraînera probablement davantage de mégafusions entre les grandes sociétés pétrolières et gazières canadiennes, estime un analyste chevronné des sables bitumineux.

« Ce n’est probablement que le début de grosses transactions dans le secteur énergétique canadien et cela soulève donc la question de savoir qui sera le prochain ? » a observé lundi l’analyste Phil Skolnick, de Eight Capital, dans un rapport.

« Comme on le voit aux États-Unis avec l’accélération des fusions et acquisitions, lorsqu’il y a une transaction significative, il est probable que d’autres suivent. »

Plusieurs observateurs de l’industrie désignent le producteur de sables bitumineux de Calgary MEG Energy comme principale cible potentielle, notamment en raison de l’échec de la tentative de prise de contrôle hostile de Husky de 3,3 milliards sur cette rivale de plus petite taille, il y a deux ans.

Dans son rapport, M. Skolnick présente des scénarios dans lesquels Canadian Natural Resources (CNQ) ou la Pétrolière Impériale rachètent MEG, tout en estimant également les chiffres qui seraient en cause si jamais Canadian Natural se combinait avec l’Impériale ou Suncor, ou si Suncor devait fusionner avec l’Impériale.

« Certains [scénarios] ont déjà été étudiés et j’en évoquais simplement de nouveaux — une fusion entre CNQ et Suncor n’est pas quelque chose que dont j’ai entendu parler, mais ce n’était pas le cas non plus pour Cenovus et Husky », a-t-il expliqué lors d’une entrevue.

Les analystes ont généralement applaudi le regroupement surprise entre Cenovus et Husky, annoncé dimanche, pour ses avantages opérationnels, mais ont critiqué la prime de plus de 20 % allongée pour Husky.

« L’accord a un sens stratégique », a affirmé l’analyste Manav Gupta, de Credit Suisse, dans une note aux investisseurs.

« À l’instar des sociétés d’exploration et de production américaines, les sociétés énergétiques canadiennes doivent également se rassembler, réduire leurs coûts et devenir plus agiles pour mieux s’adapter à la baisse de la demande d’énergie dans le monde postpandémique. »

Il a ajouté que la réputation de Cenovus en tant qu’exploitant efficace dans ses projets de sables bitumineux à injection de vapeur aiderait Husky à surmonter ses problèmes opérationnels, notamment des coûts d’exploitation et administratifs plus élevés.

Les entreprises ont identifié 1,2 milliard en économies de coûts annuelles potentielles, qui comprendront des réductions d’effectifs.

Mais M. Gupta a ajouté que la prime était « excessive » et s’est joint à d’autres observateurs pour prédire que les actions de Cenovus se négocieraient à la baisse, comme elles l’ont fait dès lundi matin. Elles ont chuté de 41 cents, soit 8,4 %, pour clôturer à 4,47 $ à la Bourse de Toronto.

Le titre de Husky, quant à lui, a gagné 38 cents, ou 12 % à 3,55 $.

En vertu de l’entente annoncée dimanche, les actionnaires de Husky recevront 0,7845 action de Cenovus en plus d’un bon de souscription pour 0,0651 action de Cenovus en échange de chacune de leur action ordinaire de Husky.

Les actionnaires de Cenovus détiendront environ 61 % de la nouvelle entité une fois l’opération complétée, par rapport à environ 39 % pour les actionnaires de Husky.

La transaction devra être approuvée par au moins les deux tiers des actionnaires de Husky, mais le milliardaire hongkongais Li Ka-Shing contrôle 70 % des titres de Husky et a déjà indiqué qu’il voterait pour l’entente.

L’annonce de la transaction survient alors que les sociétés du secteur des sables bitumineux se préparent à dévoiler leurs résultats financiers pour le plus récent trimestre. Suncor Énergie doit publier les siens mercredi, tandis que Cenovus et Husky le feront toutes deux jeudi.