Les entreprises canadiennes commencent à ressentir les effets de l’épidémie mortelle de coronavirus alors qu’elles annulent leurs voyages et voient la valeur de leurs actions glisser.

L’indice composé S&P/TSX de la Bourse de Toronto a enregistré lundi sa pire séance en près de quatre mois, perdant plus de 120 points, avant d’en récupérer mardi près de la moitié.

Imax a indiqué avoir reporté la sortie de cinq films après la fermeture de plus de 60 000 cinémas chinois, incluant plus de 600 des siens. Le spécialiste des écrans géants de cinéma établi à Mississauga, en Ontario, est en pleine expansion en Chine, qui héberge environ 40 % de ses salles de cinéma et génère des centaines de millions de recettes au guichet.

Air Canada offre des vols directs vers Pékin et Shanghai depuis les trois plus grandes villes du Canada, ainsi que vers l’aéroport de Wuhan — l’épicentre du virus — via un partenaire. Son action a chuté d’environ 12 % la semaine dernière. Le transporteur montréalais permet aux passagers de modifier gratuitement leurs réservations pour les vols vers les villes chinoises.

Les secteurs de la vente au détail à l’assurance, en passant par l’exploitation minière et la fabrication, se préparent à encaisser l’impact du virus. Des sociétés comme Canada Goose Holdings, la Financière Sun Life, Teck Resources et Magna International — qui compte près de 19 000 employés dans des usines et des bureaux en Chine — suspendent leurs projets de voyage ou demandent à leur personnel de travailler à domicile. Tous, sauf la Sun Life, ont vu leur titre chuter d’entre 5 % et 15 % au cours de la dernière semaine.

Bombardier, le constructeur d’avions et de trains de Montréal qui emploie quelque 8000 travailleurs en Chine, a fait écho à d’autres entreprises canadiennes implantées sur le continent. Il a indiqué qu’il « surveillait l’évolution de la situation » et qu’il avait demandé au personnel de « suivre à la lettre les instructions de voyage et de santé publique émises par les autorités chinoises ».

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Une usine d'assemblage de Bombardier Q400 à Shenyang, en Chine.

Colin Cieszynski, stratège en chef chez SIA Wealth Management, estime que les marchés au-delà de la région Asie-Pacifique sont stabilisés pour l’instant.

« Alors que des efforts sont toujours en cours pour contenir l’épidémie de coronavirus, y compris la réduction des déplacements entre la Chine continentale et Hong Kong, les investisseurs se sont arrêtés pour évaluer la situation, dont une grande partie reste couverte d’incertitude », a-t-il indiqué dans une note de recherche.

Étendue inférieure à celle du SRAS

Le virus a tué au moins 106 personnes et en a infecté plus de 2750 autres, selon des responsables chinois. La maladie grippale s’est propagée à au moins une dizaine d’autres pays d’Europe et d’Amérique du Nord, dont deux cas à Toronto.

Une prolifération plus large au-delà des côtes chinoises entraînerait « une perturbation économique mondiale de plus en plus importante », a observé Beata Caranci, économiste en chef au service d’études économiques de la Banque TD, dans une note.

« Il ne fait aucun doute que les cas confirmés continueront d’augmenter dans le monde à court terme, mais les autorités chinoises ont démontré une réponse plus rapide et plus transparente que l’épisode du SRAS, à la fois au niveau national et en alertant l’Organisation mondiale de la santé. »

L’étendue de l’épidémie à ce jour est bien inférieure à la propagation du syndrome respiratoire aigu sévère, une maladie de la même famille que le coronavirus, qui s’était propagée de la Chine à plus de deux dizaines de pays, dont le Canada, en 2003.

Le SRAS a infecté plus de 8000 personnes dans le monde, tuant près de 800 personnes, selon l’Organisation mondiale de la santé. La maladie a infecté environ 438 patients canadiens et a causé 44 décès dans la région de Toronto, qui a été l’épicentre du virus à l’extérieur de la Chine.

Le SRAS a coûté au pays 5,25 milliards et environ 28 000 emplois en 2003, selon un rapport produit en 2014 par Kai Ostwald, professeur adjoint à l’école de politique publique et des affaires mondiales de l’Université de la Colombie-Britannique.

Les dommages étaient attribuables, en grande partie, à des changements motivés par la peur dans le comportement des consommateurs, plutôt qu’à une hausse des dépenses médicales, a expliqué M. Ostwald.

« Plus précisément, la peur de la contagion a provoqué un comportement d’aversion généralisé, dans lequel les gens réduisaient considérablement les activités qui les mettaient à proximité des autres. Cela comprenait non seulement des choses comme prendre l’avion et manger dans les restaurants, mais aussi les activités dans les lieux de travail et la fréquentation scolaire », a-t-il écrit.