La coopérative de producteurs laitiers Agropur, de Longueuil, évalue ses options en vue de réduire son endettement au moment où sa rentabilité est sous pression. La Banque Nationale a été mandatée pour l’épauler dans son exercice de révision stratégique, a appris La Presse.

Selon nos informations, la Financière Banque Nationale (FBN) aide Agropur à trouver des solutions stratégiques pour l’aider à redresser la barre. 

Parmi les solutions étudiées, il est question de diminuer la dette par un essaimage (spin-off) de la division américaine. Dans ce cas de figure, des participations dans la nouvelle entité pourraient être vendues à un tiers. La coopérative évalue également la possibilité de vendre sa division des fromages fins. À ce stade-ci, on ne doit toutefois pas exclure que le transformateur trouve du financement moins cher ailleurs.

Agropur et FBN n’ont pas voulu confirmer l’information.

Le transformateur laitier vit des heures sombres. L’organisation a licencié 125 cadres la semaine dernière partout au Canada, dont une cinquantaine au siège social de l’arrondissement de Saint-Hubert, à Longueuil, sur la Rive-Sud.

La coopérative est endettée. La dette à long terme s’élève à 1,48 milliard au 3 août 2019. Après trois trimestres cette année, les frais financiers dépassent les 47,8 millions. Agropur a aussi dû verser 31,4 millions en dividendes sur des parts privilégiées, alors que l’excédent net s’élève à 20,5 millions.

Un prêt libellé en dollars américains valant 850 millions en dollars canadiens porte intérêt à 4,36 %. La coopérative doit rencontrer certains ratios financiers. La dette arrive à échéance en grande partie en 2022.

La semaine dernière, on a appris le départ de six vice-présidents d’Agropur dans une vague de licenciements, moins d’un mois après l’arrivée en poste d’un nouveau PDG, Émile Cordeau. Il remplace le chef de la direction sortant Robert Coallier. Ces mises à pied s’ajoutent à celles qui sont liées aux annonces récentes de la fermeture de deux usines québécoises : à Saint-Damase et Lachute.

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Et si Agropur mettait en vente sa division des fromages fins ? C'est loin d’être une idée farfelue, selon l’information colligée par La Presse auprès d’acteurs de l’industrie fromagère.

Fromages fins

La vente possible de la division des fromages fins d’Agropur est loin d’être une idée farfelue, selon l’information colligée par La Presse auprès d’acteurs de l’industrie fromagère.

Sous le sceau d’Agropur Signature, le Champfleury, par exemple, et un autre camembert, l’Extra, ne parvenaient pas à générer les marges bénéficiaires que la coopérative aurait souhaité obtenir, nous a indiqué un industriel qui tient à garder l’anonymat pour ne pas nuire à ses affaires. « C’est du beau branding, mais ils ne font pas d’argent avec ça », a-t-il dit.

Qui pourrait se porter acquéreur de la division des fromages fins ? Les noms de Saputo, Lactalis et même Chalifoux sont revenus à plusieurs reprises dans les discussions.

Un autre acteur qui a demandé l’anonymat pour des raisons semblables indique que la vente de la division des fromages fins permettrait à Agropur de conserver le contrôle de la division américaine, laquelle est payante.

En 2014, Agropur a fait l’acquisition des actifs de Davisco Foods International, une entreprise américaine spécialisée dans la fabrication de fromages et la transformation laitière. À l’époque, la transaction a fait doubler les activités américaines de transformation d’Agropur et a fait accroître de 50 % l’ensemble de son approvisionnement en lait.

« S’ils vendent Davisco, nous dit le second industriel, ils vont perdre ce qui est rentable. Ils n’ont pas grand-chose qui vaut de l’argent. Le yogourt, ça vaut pas mal moins cher que ça valait. Les parts de marché se gagnent à coup de microparts », confie-t-il.

Fondée en 1938, Agropur a réalisé un chiffre d’affaires de 6,7 milliards en 2018. La plus importante coopérative laitière au pays compte 3161 membres et 8800 employés, dont 6400 au Canada.

Agropur transforme plus de 6,2 milliards de litres de lait par an dans ses 39 usines en Amérique du Nord. Elle est détentrice des marques Natrel, OKA, iÖGO, biPro, Agropur Grand Cheddar, Olympic, Farmers, Island Farms et Québon.