Peut-on éviter à 100 % que ses employés fraudent ou qu’ils dérobent des données, comme c’est arrivé chez Desjardins ? Non. 

« Ce sont parmi les situations les plus catastrophiques pour un employeur, note Éric Lallier, avocat en droit du travail de la firme Norton Rose Fulbright Canada. Et ça peut arriver même avec tous les mécanismes en place. »

N’empêche. « On peut mettre des moyens en place pour limiter de tels agissements », estime Manon Poirier, directrice générale de l’Ordre des conseillers en ressources humaines agréés.

Encadrement serré

Et ces moyens doivent être implantés tant à l’étape du processus d’embauche qu’au cours de la vie dans le bureau d’un employé, qu’au niveau des outils technologiques de l’entreprise.

Les mécanismes de protection s’amorcent avec l’évidente validation des informations sur un CV. Dans certains cas, une enquête de crédit peut être justifiée, selon certains postes. La vérification des antécédents judiciaires également.

Une direction peut aussi se prémunir grâce au profil qui résulte des tests psychométriques lors du processus d’embauche.

Ce profil [psychométrique] permet de mesurer plein de choses, dont l’intégrité de la personne. Ce n’est pas une science parfaite, mais ça donne des indicateurs.

Manon Poirier

Autre bonne pratique ? « Faire signer des avis de confidentialité claires, dit Éric Lallier. À l’embauche ou en cours d’emploi, sur des projets spéciaux, quand une personne change de fonction… Cet encadrement peut se faire à bien des moments. »

Envoyer les bons messages

Une organisation devrait toujours clarifier ses attentes aux plans de l’éthique et de ses valeurs. « Plusieurs font signer un code d’éthique, même chaque année, dit Manon Poirier. Ça a un aspect d’abord moral, mais ça lance le message que c’est important et qu’on s’attend à un certain type de comportement de la part de l’employé. »

Même dans le tourbillon du quotidien, il est bon que les gestionnaires soient à l’affût des changements de comportement de leur personnel.

Il faut réagir si un comportement se présente, et ne pas le tolérer. Dans le commerce de détail, par exemple, les vols internes sont une réalité. Il faut quand même agir si un vol se produit.

Manon Poirier

« D’ailleurs, les organisations qui subissent de la fraude ne vont pas toutes au criminel, en se disant : on a congédié la personne fautive. Je ne suis pas certaine qu’on envoie alors le bon message. Il faut lancer une action même si ça nous expose. »

Surveillance

Par ailleurs, peut-on épier les employés avec des caméras, lire leurs courriels, écouter leurs conversations téléphoniques ? « Il y a des droits pour des employeurs de faire de la surveillance, répond Éric Lallier. Des équipes internes le font dans les banques, par exemple. On peut faire de la surveillance active de quelqu’un à son insu si on a un motif sérieux. »

À ce titre, on recommande des politiques de surveillance claires en entreprise. « Les employés savent, compte tenu de l’industrie dans laquelle ils œuvrent (banques, jeu vidéo), qu’il y a de tels mécanismes, dit Éric Lallier. L’idée est la limite de l’expectative de la vie privée. C’est plus facile d’en avoir dans certaines industries, en avertissant l’employé. »

C’est toujours une question de proportionnalité. Il faut avoir de bonnes raisons de le faire. Je pense aux caméras de surveillance dans le commerce de détail.

Éric Lallier

Une réalité des entreprises, grandes ou petites, est qu’elles se dotent plus naturellement de mécanismes pour les gestes externes qu’internes. Or, il faut avoir des yeux partout et ne jamais détacher son regard.

« Selon un vieux principe, les criminels sont toujours un pas devant les policiers, lance Éric Lallier. Malheureusement, beaucoup de gens passent du temps et de l’énergie à contourner les règles. Il faut donc continuer d’investir constamment dans la protection et la technologie. »