(Montréal) Pendant que le président et chef de la direction de Québecor, Pierre Karl Péladeau, évalue la possibilité d’acquérir Transat A. T., un autre joueur désirant conserver le voyagiste dans sa forme actuelle a déjà soumis son offre.

Après « plusieurs mois » de discussions, le président du développeur immobilier Groupe Mach, Vincent Chiara, a déposé sa proposition, dans laquelle l’aide du gouvernement Legault n’est pas requise, avant même que la société mère d’Air Transat dévoile la tenue de pourparlers avec de potentiels acquéreurs, le 30 avril dernier.

En entrevue téléphonique avec La Presse canadienne, jeudi, l’homme d’affaires, dont l’entreprise a racheté la tour de Radio-Canada au centre-ville de Montréal, a dit vouloir conserver les activités de Transat A. T., qui, à son avis, sont complémentaires à ses ambitions.

« Nous avions l’idée de bâtir un portefeuille (immobilier) dans l’hôtellerie et eux avaient une plateforme et des projets dans leurs plans de construire exactement cela, a-t-il raconté. Nous voyons une synergie dans nos approches. »

M. Chiara a fait ces commentaires quelques heures après que M. Péladeau eut confirmé, en marge de l’assemblée annuelle de Québecor, qu’il procédait à une analyse financière de la société à titre personnel, sans toutefois fermer la porte à une éventuelle implication du conglomérat.

Dans le cadre de son virage, Transat A. T. souhaite consacrer environ 750 millions à la mise sur pied d’un réseau d’hôtels sur les plages des destinations soleil, dans l’espoir de mieux positionner l’entreprise, à compter de 2021-2022, face à la concurrence accrue de rivales comme Air Canada Rouge, Vacances WestJet et Sunwing Airlines.

« Ils sont capables de remplir des chambres et avec cette capacité, on élimine beaucoup de risques pour le développement de l’hôtellerie, a expliqué M. Chiara. Notre but n’est pas de leur apprendre à gérer cette partie de l’entreprise. La synergie que l’on va amener, c’est évidemment notre capacité de développeur dans l’immobilier. »

À Québec, le ministre de l’Économie, Pierre Fitzgibbon, a signalé, dans une mêlée de presse, qu’il y avait plus que deux acquéreurs potentiels sur les rangs pour Transat A. T. Rappelant que cette industrie était difficile, il a dit que l’aventure s’adressait à des « adultes avertis ».

« Historiquement, il y a beaucoup de monde qui ont eu des échecs, a lancé M. Fitzgibbon, qui n’écarte pas la participation du gouvernement québécois à un montage financier si nécessaire. Je ne m’attends pas à avoir 25 acheteurs. »

Un morceau privé

M. Chiara souhaite conserver Transat A. T. dans sa forme actuelle, mais il veut néanmoins fermer le capital de la société, estimant que l’on dispose de moins de flexibilité pour réaliser des projets lorsqu’on doit rendre des comptes tous les trimestres.

« Quand notre plan est de bâtir un portefeuille dans l’hôtellerie et que les résultats ne s’observeront que dans deux ou trois ans, c’est difficile d’être dans la structure d’une compagnie cotée en bourse », a-t-il dit.

Le principal actionnaire du voyagiste — qui compte quelque 5000 employés — est la firme Letko, Brosseau et associés, avec une participation de 18,14 %, devant le Fonds de solidarité FTQ, propriétaire à hauteur de 11,58 %. La Caisse de dépôt et placement du Québec détient également une participation de 5,84 %.

Le président de Groupe Mach n’a pas fermé la porte à une collaboration avec les plus importants actionnaires qui souhaitent conserver leur participation dans le voyagiste.

« Certains ont manifesté la volonté de demeurer dans la compagnie même si on en ferme le capital, a dit M. Chiara. Nous avons signalé à des actionnaires que nous étions ouverts à les recevoir dans une nouvelle structure. »

Encore au début

De son côté, M. Péladeau, qui vient de mettre la main sur Taxelco, la société mère de Téo Taxi, s’est montré très prudent dans ses commentaires à l’endroit de Transat A. T.

« Pour l’instant, je le fais à titre personnel, a-t-il fait savoir en point de presse. J’ai mentionné que je fais une analyse financière puis par la suite on verra. J’ai toujours pensé que l’on doit être opportuniste dans la vie. Lorsqu’il y a des occasions qui peuvent être bénéfiques à plusieurs égards, je pense qu’il y a une obligation de les regarder. »