(San Francisco) Malgré des débuts boursiers difficiles et les incertitudes entourant le modèle économique, Uber a semblé rassurer les investisseurs jeudi avec ses résultats trimestriels, qui ont confirmé de fortes pertes, mais aussi une hausse de l’activité, aidée par son service de livraisons de repas.

Après s’être montrés d’abord fébriles dans la foulée de ces premiers résultats publiés depuis l’entrée du groupe à Wall Street le 10 mai, les investisseurs ont finalement semblé rassurés par les propos optimistes des responsables en conférence téléphonique, qui ont notamment dit que la concurrence semblait un peu moins agressive dans la guerre des prix.

Après de violents mouvements de yoyo, le titre avançait de 2,80 % vers 22 h 25  GMT dans les échanges électroniques post séance officielle.

À quelque 41 dollars, le titre reste néanmoins en deçà de son prix d’introduction de 45 dollars. Son concurrent numéro un aux États-Unis, Lyft connaît également des débuts boursiers compliqués, illustration là aussi toutes les incertitudes entourant leur modèle économique.

À cet égard, le patron Dara Khosrowshahi a assuré que les débuts boursiers décevants étaient une étape « du long voyage destiné à faire d’Uber une plateforme de mobilité pour les gens et les biens dans le monde entier à grande échelle ».  

« Notre boulot, c’est de grossir vite […] et de façon plus efficiente, pendant très très longtemps », a ajouté le responsable, nommé en 2017 pour redorer la réputation du groupe après le départ chaotique de son cofondateur à l’image sulfureuse, Travis Kalanick.

Et de fait la croissance est là : le chiffre d’affaires du premier trimestre s’est inscrit en hausse de 20 % à 3,1 milliards de dollars. Uber a aussi enregistré une hausse de 34 % de ses réservations brutes (essentiellement les recettes avant déductions des taxes, péages ou diverses rémunérations des chauffeurs) à 14,7 milliards de dollars.  

Toutefois, ces rythmes de progression sont nettement moindres que l’an dernier.

Et l’hémorragie financière a continué : Uber a perdu 1 milliard de dollars au premier trimestre, soit environ deux fois plus que l’an dernier.

Et « nous n’hésiterons pas à investir pour défendre nos parts de marché dans le monde », a précisé le directeur financier Nelson Chai, qui a toutefois aussi précisé avoir relevé des tarifs « moins agressifs » chez les concurrents, ce qui pourrait soulager un peu le groupe dans cette guerre des prix.

UberEats

En termes de chiffre d’affaires, la progression a en tout cas été nettement tirée par les livraisons de repas, une des activités de diversification sur lesquelles mise le groupe : UberEats a vu son chiffre d’affaires s’envoler de 89 % à 536 millions de dollars quand la réservation de voitures n’a progressé que de moins de 10 %.

Mais c’est aussi une activité coûteuse : Uber doit rémunérer non seulement les livreurs, mais aussi les restaurants. En déduisant ces rémunérations, les recettes tombent à 239 millions (+31 %).

Uber a en effet choisi de se diversifier et a adopté récemment un nouveau crédo, devenir l’Amazon des transports. L’entreprise s’est aussi lancée dans les vélos et les trottinettes électriques en libre service, le transport de fret…  

Son cœur de métier n’est pas rentable, en particulier parce que, pour maintenir un prix de course attractif et attirer clients et chauffeurs, Uber a multiplié réductions, promotions, bonus, etc…

La réservation de voitures avec chauffeur est un marché délicat car soumis à de nombreux risques : la concurrence, les menaces légales et réglementaires et les revendications des chauffeurs, qui sont nombreux à demander hausse des rémunérations et un statut plus protecteur que travailleur indépendant.

Des chauffeurs Uber avaient d’ailleurs manifesté dans plusieurs villes juste avant l’entrée du groupe à Wall Street, pour réclamer de meilleures rémunérations et un statut moins précaire.

L’entreprise reste par ailleurs confrontée de façon récurrente à des problèmes juridiques dans plusieurs pays, contestée voire interdite ou soumise à des restrictions dissuasives, le plus souvent accusée de concurrence déloyale face aux taxis traditionnels.

À terme, il parie, comme beaucoup d’autres, sur la voiture sans chauffeur.

Uber a annoncé en mars le rachat de son concurrent au Moyen-Orient, Careem, pour 3,1 milliards de dollars.