(Bonn) Le patron de Bayer, Werner Baumann, a défendu vendredi face à ses actionnaires le rachat l’an dernier du géant américain des pesticides et des OGM Monsanto, lors d’une assemblée générale cernée par plusieurs centaines de manifestants.

Les quelque 13 400 requêtes visant désormais l’herbicide au glyphosate de Monsanto aux États-Unis « font porter une lourde charge à notre compagnie et inquiètent de nombreuses personnes », a d’emblée reconnu M. Baumann.

Cette pluie de procédures, après deux condamnations en quelques mois à verser au total 158,8 millions de dollars d’indemnités, a contribué à faire plonger le titre Bayer de près de 40 % en Bourse depuis l’acquisition de Monsanto en juin 2018.

L’année écoulée « a été un cauchemar pour les actionnaires » et « le cours de Bourse nous promet des nuits sans sommeil », a déploré Mark Tümmler, de la fédération d’investisseurs DSW, inquiet des atteintes à la « réputation » de Bayer.

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Quelque 500 manifestants entourant vendredi le centre de conférences de Bonn.

Le groupe est dans le viseur des mouvements écologiques, avec quelque 500 manifestants entourant vendredi le centre de conférences de Bonn pour appeler à « stopper le glyphosate » et jeter sous les pieds des actionnaires des abeilles mortes, pour dénoncer les ravages des néonicotinoïdes sur ces insectes.

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Des manifestants ont jeté sous les pieds des actionnaires des abeilles mortes pour dénoncer les ravages des néonicotinoïdes sur ces insectes.

Mais Bayer « demeure optimiste » sur le front judiciaire, et espère que les cours d’appel saisies dans les deux premiers dossiers américains « rendront des décisions différentes », « basées sur l’analyse scientifique et non sur l’émotion », a assuré Werner Baumann.

Le groupe allemand martèle depuis l’été dernier qu’aucun régulateur dans le monde n’a conclu à la dangerosité du glyphosate depuis sa mise sur le marché au milieu des années 1970, et met en avant « 800 études rigoureuses » sur ses effets.

Le Centre international de recherche sur le cancer, une émanation de l’OMS, a lui considéré en 2015 que le glyphosate était « probablement cancérigène », de même que les jurés californiens qui ont condamné Monsanto.

« Nous demeurons convaincus du caractère sûr du glyphosate », a insisté Werner Baumann, à l’origine du pari historique pris par Bayer en déboursant 63 milliards de dollars pour acquérir Monsanto.

Depuis sa déconfiture boursière, l’inventeur de l’aspirine n’est plus valorisé qu’à 57 milliards d’euros environ, soit à peine plus que le prix consenti pour avaler sa cible.

« En l’espace de deux ans, l’ancien géant pharmaceutique s’est mué en nain », et risque désormais « d’être absorbé et démantelé » par un prédateur, s’inquiète Ingo Speich, de la banque Deka.

Depuis le départ, pour justifier son aventure américaine, le groupe de Leverkusen défend la vision de long terme d’une agriculture toujours plus stimulée par la chimie, pour nourrir une population mondiale croissante alors que le réchauffement climatique perturbe les terres arables.

Et pour M. Baumann, la pertinence économique du mariage reste intacte, puisque le groupe fusionné détient « des activités leaders dans la protection chimique et biologique des récoltes, les semences conventionnelles et “biotech”, et l’assistance numérique à l’agriculture ».

La désaffection actuelle des investisseurs pour le titre est « exagérée » et ne reflète pas la « valeur réelle » du groupe, a-t-il affirmé.