À court terme, le déplafonnement des allocations professionnelles versées aux pharmaciens n'aura pas de répercussions négatives significatives sur la performance financière du Groupe Jean Coutu, estime son grand patron.

Dès jeudi, le pourcentage de ristournes que les fabricants de médicaments génériques peuvent verser aux pharmaciens passera de 15 à 25 % pour six mois et à 30 % pour les trois mois suivants.

Par la suite, un déplafonnement complet est prévu pour deux ans et trois mois. Cette mesure vise à compenser pour les coupes d'honoraires annuelles de 133 millions $ sur trois ans auxquelles les pharmaciens ont consenti.

Jean Coutu, qui exploite le fabricant de médicaments génériques Pro Doc, a déjà admis dans le passé que ces changements nuiraient à sa filiale, tout en minimisant la portée des impacts négatifs.

«Au moins, c'est maintenant plus clair, a expliqué mercredi le président et chef de la direction François Coutu, au cours d'un entretien téléphonique visant à analyser les résultats du quatrième trimestre de l'entreprise. Pour nous, rien ne va changer.»

Les ristournes sont les montants remis par les fabricants de médicaments génériques aux pharmaciens en fonction du volume d'achat effectué par ces derniers.

M. Coutu serait surpris de voir des pharmaciens qui exploitent les 383 établissements québécois franchisés du réseau abandonner Pro Doc au profit d'autres fabricants de médicaments génériques uniquement pour des raisons de ristournes.

«Nous avons fait en sorte que Pro Doc soit le fournisseur avec le moins de produits en ruptures de stock, et ça, c'est le plus important pour un pharmacien», a-t-il affirmé.

Pour l'exercice terminé le 27 février dernier, Pro Doc a généré un résultat opérationnel avant amortissements en faible progression, à 90,8 millions $.

Quant à l'impact financier une fois que les allocations professionnelles auront été complètement déplafonnées en 2017, le dirigeant de Jean Coutu n'a pas voulu s'adonner au jeu des prévisions.

Selon lui, «beaucoup d'eau coulera sous les ponts d'ici 2017», notamment en raison de l'avis de différend envoyé au ministre de la Santé, Gaétan Barrette, par l'Association québécoise des pharmaciens propriétaires. Elle reproche au ministre d'être revenu sur les termes de l'entente de juin 2015 en retardant l'abolition complète du plafond.

«C'est entre les mains du ministre», s'est limité à dire M. Coutu.

Par ailleurs, le dirigeant de Jean Coutu ignore toujours les étapes à venir entourant le projet de loi 81 devant permettre au gouvernement du Québec de lancer des appels d'offres pour l'achat de médicaments génériques.

Dans le cadre de la commission parlementaire sur le sujet, en mars dernier, M. Coutu avait défilé, avec d'autres acteurs du secteur, afin de s'opposer aux changements proposés par Québec.

Compte tenu de l'incertitude entourant les ristournes et le projet de loi 81, l'analyste Irene Nattel, de RBC Marchés des capitaux, recommande, dans une note aux investisseurs, de demeurer «sur les lignes de côté» en ce qui a trait au titre de Jean Coutu.

Performance trimestrielle en baisse

Au quatrième trimestre, l'entreprise a tout juste raté les attentes des analystes, ce qui s'est reflété sur le cours de son action à la Bourse de Toronto. Elle a clôturé en baisse de 1,16 $, soit 5,77 %, à 18,93 $.

Jean Coutu a vu ses profits nets fléchir de 6,7 %, à 51,5 millions $, ou 28 cents par action.

De leur côté, les revenus se sont établis à 706,6 millions $, en baisse de 0,01 %, au cours d'un trimestre marqué par un indice grippal plus faible par rapport à l'an dernier.

Cela a incité moins de consommateurs à acheter des médicaments pour le rhume et la grippe en vente libre sur les tablettes des pharmacies Jean Coutu.

Avec une pointe d'humour, M. Coutu a souligné que l'année dernière avait été «très bonne» au chapitre de l'indice grippal, ce qui avait stimulé les ventes de médicaments.

Les analystes sondés par Thomson Reuters tablaient sur un chiffre d'affaires de 725,6 millions $ ainsi qu'un profit par action de 30 cents.

Pour leur part, les ventes au détail des établissements ouverts depuis au moins un an - un indicateur clé dans le secteur - ont progressé de 0,3 %. Un recul de 0,3 % a été constaté du côté de la section pharmaceutique, alors que la section commerciale a connu une croissance de 0,9 %.