Confronté à la perte des brevets sur ses médicaments vedettes, le laboratoire américain Pfizer (PFE) espère toujours s'emparer de son concurrent britannique AstraZeneca (AZN), après un premier trimestre ayant confirmé une érosion continue de ses ventes.

Malgré trois refus catégoriques de sa cible, le groupe pharmaceutique américain ne veut pas renoncer à un mariage qui lui apporterait non seulement des avantages fiscaux mais aussi des médicaments en développement prometteurs dans les secteurs à fort potentiel que sont l'oncologie et l'immunothérapie.

Pfizer «espère que la proposition relevée va permettre de convaincre AstraZeneca d'engager des discussions en vue d'un rapprochement entre les deux entreprises», a indiqué le groupe new-yorkais dans un communiqué.

«Nous examinons toutes nos options», a souligné le PDG Ian Read lors de la présentation des résultats du groupe sans davantage de précisions.

Le 2 mai, Pfizer a relevé à 106 milliards de dollars son offre de rachat d'AstraZeneca qui se veut amicale mais s'est à nouveau heurtée au refus catégorique du groupe britannique, lequel défend vigoureusement son indépendance.

Cette nouvelle proposition faisait suite à deux premières offres, dont une à environ 99 milliards de dollars en janvier.

Des milliards perdus en trois ans

Un mariage entre les deux groupes pharmaceutiques créerait un mastodonte et constituerait la plus grosse opération jamais réalisée dans le secteur. Pfizer a jusqu'au 26 mai à 12h00 (heure de Montréal) pour décider s'il lance une offre formelle, selon le code boursier britannique.

Première conséquence de cette offensive: l'objectif de bénéfice annuel (2,20-2,30 dollars par action) annoncé en janvier est devenu caduc. Cette décision est due à une exigence de la loi britannique en matière de fusion-acquisition, explique le groupe promettant une prévision actualisée «le plus vite possible».

Alors que la pharmacie est en ébullition avec des réorganisations tous azimuts, dont un échange d'actifs à plusieurs milliards de dollars entre Novartis, GlaxoSmithKline et Eli Lilly, le temps presse pour Pfizer, dont le chiffre d'affaires continue de diminuer.

«Pfizer traverse des moments difficiles qui accroissent l'intérêt pour une fusion avec AstraZeneca», estime Alex Arfaei, analyste chez BMO Capital Markets.

Si Pfizer a dégagé un bénéfice net meilleur que prévu au premier trimestre, il est en baisse de 15,3% sur un an, à 2,32 milliards de dollars. Et le chiffre d'affaires a reculé davantage que prévu à 11,35 milliards de dollars (-8,5% sur un an), contre 12,09 milliards attendus. En trois ans, le groupe américain a perdu 5 milliards de dollars de chiffre d'affaires.

Ce recul s'explique par la baisse des recettes tirées de la vente de ses médicaments vedettes.

Les ventes de l'anti-cholestérol Lipitor ont encore chuté de 27%. Depuis que les brevets de ce dernier sont tombés dans le domaine public, le manque à gagner se chiffre en milliards de dollars.

Les recettes tirées des ventes de la petite pilule bleue Viagra (-19%) contre les troubles de l'érection sont aussi en fort déclin. Idem pour les ventes de l' anti-inflammatoire Celebrex utilisé notamment dans le traitement de l'arthrose (-4%).

De petits espoirs

Pour l'instant, ce déclin est limité par les bonnes performances d'autres «blockbusters» comme le Lyrica (douleurs associées à certains troubles nerveux, +8%) ou des ventes du traitement des maladies auto-immunes Enbrel (+4%). Mais l'Enbrel va pâtir dans l'avenir de la fin d'un accord de co-marketing en Amérique du Nord avec la biotech Amgen.

Face aux «défis» que lui pose la concurrence des génériques, Pfizer fonde ses espoirs sur le traitement expérimental du cancer du sein Palbociclib ainsi que sur des vaccins de la famille des Prevnar contre les infections invasives comme la pneumonie et l'otite.

En attendant, le chiffre d'affaires va encore diminuer de plusieurs milliards cette année: Pfizer anticipe des recettes entre 49,2 et 51,2 milliards de dollars, contre 49,79 milliards attendus par le marché en moyenne.

À la Bourse de New York, l'action du groupe, qui prévoit de racheter pour 5 milliards de dollars de ses propres actions cette année, dont 1,7 milliard l'ont déjà été, reculait de 2,34% à 30,03 dollars.