Si l'aéroport de Belfast n'avait pas été situé en plein champ, le sort des 185 personnes à bord d'un avion du transporteur canadien Sunwing qui a peiné à décoller à cause d'une erreur de ses pilotes aurait pu être tragique, conclut un rapport des autorités britanniques sur un incident survenu en juillet 2017.

«Seules la nature bénigne du dégagement prolongé de la piste et l'absence d'obstacles dans la trajectoire de la montée ont permis à l'avion de grimper sans autre collision après qu'il eut embouti une lumière de la piste», constatent les enquêteurs de l'Air Accidents Investigation Branch britannique dans un rapport publié hier.

«Si un moteur avait connu une défaillance à un moment critique du décollage, les conséquences auraient pu être catastrophiques.»

Le Boeing 737-800 appartenant à la compagnie Sunwing était piloté par deux pilotes canadiens, même s'il avait été prêté à un opérateur britannique pour ce vol devant relier Belfast à Corfu, en Grèce.

L'erreur, qui aurait pu être fatale, est survenue avant le décollage, quand les pilotes ont inscrit manuellement la température extérieure dans le système de gestion de vol de l'appareil.

Plutôt que les 16 °C qu'il faisait réellement  à Belfast à ce moment, ils ont inscrit -52 °C.

À cause de sa densité plus élevée, l'air plus froid facilite normalement le décollage. En croyant qu'il faisait plus froid qu'en réalité, le Boeing n'a donc utilisé que 81,5% de sa puissance, plutôt que les 92,7% qui auraient normalement été nécessaires.

Au ras des pâquerettes

Il restait à peine 900 mètres de piste quand les pilotes ont réalisé que leur vitesse posait problème. Ils n'ont toutefois pas réagi immédiatement. L'avion a réussi à quitter le sol avant la fin de la piste, mais tout juste. Volant au ras des pâquerettes, ses roues ont percuté une lumière de piste haute d'à peine 36 centimètres et située près de 30 mètres après la fin de celle-ci.

L'avion a ainsi parcouru 4 kilomètres, atteignant une altitude d'à peine 800 pieds, avant que l'équipage ne mette les gaz au fond et que l'avion puisse finalement reprendre une altitude convenable.

Les enquêteurs n'arrivent à aucune conclusion ferme en ce qui a trait à la raison pour laquelle les deux pilotes canadiens ont entré la mauvaise température. Ils notent cependant que le commandant, même s'il n'avait pas travaillé la veille, souffrait encore du décalage horaire. Il était arrivé d'Amérique du Nord la veille au matin.

Ils notent aussi que le niveau de puissance affiché par le système après l'entrée de la mauvaise donnée, même s'il se situait sous les 90%, «n'était pas inusuel pour un équipage habitué aux températures très froides du Canada».

L'enquête relève toutefois qu'il existait déjà, à ce moment, une mise à jour des systèmes du 737 grâce à laquelle celui-ci aurait pu comparer la température saisie par les pilotes à celle que ses propres thermomètres captaient, ce qui aurait permis de relever l'erreur. Sunwing n'avait toutefois pas encore procédé à cette mise à jour.

Le gouvernement fédéral est actuellement engagé dans un processus de révision des règles entourant la fatigue des pilotes canadiens, qui sont actuellement parmi les plus laxistes au monde. Interrogé la semaine dernière, le ministre des Transports, Marc Garneau, a refusé de formuler un échéancier pour la promulgation de ces nouvelles règles.