Le nouveau chien de garde du bilinguisme au pays, Raymond Théberge, doute que punir Air Canada en lui infligeant des amendes en cas d'infraction à la Loi sur les langues officielles ait un effet dissuasif.

En entrevue avec La Presse canadienne, mardi, le commissaire aux langues officielles a émis des réserves face à cette recommandation formulée en novembre dernier par un comité parlementaire tout en reconnaissant qu'il n'avait «pas la solution».

Le commissaire Théberge a exprimé sa «réticence», arguant que frapper Air Canada de pénalités financières en cas d'infraction «ne changera pas» le «cost of doing business» de la compagnie, et qu'il était donc nécessaire de «vraiment étudier plus ce que ça veut dire, donner des amendes».

Il dit avoir insisté sur le fait qu'«à l'exception de quelques récidivistes comme Air Canada, la grande majorité des institutions fédérales respecte la loi» et suit les recommandations du Commissariat aux langues officielles (CLO).

Comme passager, Raymond Théberge dit «écoute(r), bien sûr» pour évaluer si les employés du transporteur respectent les obligations linguistiques. Son expérience lui a permis de constater que «le service est variable, disons», mais que cela «dépend des trajets».

Le comité permanent des langues officielles a demandé au gouvernement en novembre dernier de donner au commissaire aux langues officielles le pouvoir d'imposer des amendes à toutes les institutions soumises à la Loi sur les langues officielles.

Cette piste de solution avait été mise de l'avant par l'ancien patron du CLO Graham Fraser dans un rapport spécial sur Air Canada remis au Parlement en juin 2016, dans lequel il disait toute son exaspération de voir le transporteur enfreindre la loi à répétition depuis 45 ans.

Le PDG de la compagnie aérienne, Calin Rovinescu, avait été courroucé par la publication du document portant exclusivement sur Air Canada - un geste exceptionnel. Il en avait rejeté les recommandations lors d'un passage en comité parlementaire, en juin 2016.

Le commissaire Théberge, qui est entré en fonction le 29 janvier dernier, a offert mardi sa vision de la chose dans le cadre d'une longue entrevue accordée dans ses lumineux bureaux avec vue sur la rivière des Outaouais, à Gatineau.

Il a discuté d'une variété de sujets au fil de l'entretien, dont la controverse suscitée par celle qui avait été initialement choisie pour le poste, Madeleine Meilleur, puis celle provoquée par ses commentaires sur le bilinguisme des juges de la Cour suprême du Canada.