Si l'issue de la dispute commerciale entre Boeing et Bombardier est encore incertaine, ses conséquences commencent à se faire très concrètes pour Boeing. En l'espace d'un peu plus de 24 heures, le géant américain vient vraisemblablement de se faire fermer la porte en ce qui concerne trois contrats valant ensemble jusqu'à 50 milliards de dollars.

CNN rapportait hier après-midi que le transporteur américain Delta s'apprêtait à annoncer qu'il se tournait vers Airbus pour lui fournir 100 avions monocouloirs A321neo, avec une option pour 100 appareils additionnels.

Au prix affiché de 127 millions US pour un A321neo, la portion ferme du contrat accordé par Delta a donc une valeur théorique de 12,7 milliards US (16,3 milliards CAN). Cette valeur pourrait doubler si les options étaient exercées. Il est toutefois peu probable que Delta ait payé le prix affiché.

Le choix d'Airbus, s'il se confirme, s'effectue aux dépens de Boeing, qui espérait l'emporter avec sa gamme 737 MAX. Delta est aussi l'acheteur des 75 appareils C Series qui sont au coeur de la dispute commerciale déclenchée par Boeing, ce qui aurait porté atteinte aux relations entre les deux entreprises américaines et pourrait avoir pesé dans la décision de Delta de se tourner vers Airbus.

Pour Boeing, cette perte s'ajoute à celle, confirmée mardi, d'un contrat évalué à 6,4 milliards pour la vente au gouvernement canadien de 18 avions de chasse F-18 Super Hornet.

Toujours mardi, Ottawa annonçait l'ajout d'une clause défavorisant les entreprises qui « nuisent aux intérêts économiques du Canada », allusion à peine voilée à Boeing, dans le cadre de son futur appel d'offres pour 88 nouveaux avions de chasse. Ce dernier projet est évalué à environ 19 milliards de dollars.

À eux trois, ces contrats auraient pu permettre à Boeing d'engraisser d'environ 10 % son carnet de commandes.

PAS D'ENTENTE

Pour Bombardier, le choix d'Airbus signifie la fin d'une possibilité, avancée par certains analystes, que Delta choisisse Boeing en contrepartie de l'abandon de ses démarches contre la C Series.

Cette bataille juridique se poursuivra donc et elle sera particulièrement active la semaine prochaine.

Les parties doivent en effet se retrouver lundi, à Washington, pour faire entendre leurs arguments devant les commissaires de l'International Trade Commission (ITC) des États-Unis, chargée de déterminer si des entreprises américaines ont bel et bien souffert des agissements de Bombardier.

Le lendemain, mardi, le département du Commerce doit rendre un verdict final dans son volet du dossier, qui consiste à calculer la somme du financement « illégal » qu'aurait reçu Bombardier de la part des gouvernements ainsi que le niveau de « dumping » qu'elle aurait effectué aux États-Unis.

Le Département a déterminé plus tôt cet automne qu'il fallait imposer près de 300 % de droits compensatoires et antidumping aux appareils de la C Series importés aux États-Unis. Ce taux pourrait être ajusté mardi.