Delta Air Lines se porte à la défense du partenariat entre Airbus et Bombardier dans la C Series en incitant Washington à rejeter certaines allégations soulevées par Boeing dans le cadre du litige l'opposant à l'avionneur québécois.

Dans un document déposé cette semaine auprès du département du Commerce, le transporteur aérien répond à des récentes critiques du géant de Chicago à l'égard du projet visant à assembler la famille d'avions de Bombardier aux États-Unis.

Boeing a déjà remis en question la pertinence de construire une nouvelle ligne d'assemblage de la C Series aux installations d'Airbus à Mobile, en Alabama, affirmant que l'idée n'aurait pas été soulevée sans l'imposition de mesures punitives préliminaires.

«Boeing a profité de cette occasion pour attaquer Delta, s'opposer à la création d'emplois dans le secteur manufacturier ainsi qu'à de nouveaux investissement», fait notamment valoir le transporteur aérien établi à Atlanta.

Airbus et Bombardier estiment qu'une ligne d'assemblage permettra à la C Series d'échapper aux mesures punitives d'environ 300 % décrétées au cours de l'automne par Washington même si certaines pièces fabriquées ailleurs dans le monde sont importées.

Delta, qui a passé une commande ferme pour 75 avions CS100 en 2016 avec des options pour 50 appareils supplémentaires, semble ouvrir la porte à la possibilité de repousser les premières livraisons prévues au printemps 2018 afin que ses appareils soient assemblés au sud de la frontière.

«Le département du Commerce n'a qu'à analyser la chaîne d'approvisionnement de Boeing pour constater qu'il y a une justification économique pour une ligne d'assemblage aux États-Unis», écrit Delta.

Le transporteur souligne notamment que pour sa famille d'avions 787, Boeing fait affaire avec de nombreux fournisseurs étrangers, dont certains se trouvent en Chine ainsi qu'au Japon, pour la fabrication de certaines composantes.

Selon Delta, une ligne d'assemblage de la C Series en Alabama permettrait de construire en sol américain un avion qui se situe dans une taille que Boeing a laissé tomber il y a maintenant plusieurs années.

Dans sa plainte déposée au printemps, Boeing reprochait à Bombardier d'avoir profité d'importantes aides financières afin d'offrir des prix jugés «dérisoires» au transporteur américain afin de décrocher une importante commande.

Delta a toujours rétorqué que le géant américain n'avait jamais été à la table des négociations pour ce contrat.

Au cours des dernières semaines, Bombardier, Delta, Québec, Ottawa, la Commission européenne ainsi que la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ) ont tous critiqué la démarche du département du Commerce dans le cadre de son enquête.

Ces intervenants exhortent Washington à abaisser ou annuler les droits compensatoires préliminaires de 220 % préalablement déterminés.

Le département du Commerce doit rendre sa décision définitive dans environ un mois et la Commission du commerce international des États-Unis (ITC) devra déterminer au début de 2018 si les pratiques de Bombardier ont bel et bien porté préjudice à Boeing.

Au cours de la semaine, Boeing a également soumis d'autres arguments auprès du département du Commerce en soulevant notamment qu'aucun investisseur privé n'était au rendez-vous pour la C Series en 2015, lorsque le programme traversait d'importantes turbulences.

L'avionneur américain remet donc en question l'injection de 1 milliard US par l'État québécois pour une participation de 49,5 % dans ce programme, suggérant que cette somme constitue une subvention.

Marqué par les retards et les dépassements de coûts, le programme de la C Series, qui pesait sur les finances de Bombardier, représentait un grand risque, rappelle Boeing. Selon l'entreprise, les répondants n'ont tout simplement pas été en mesure de fournir à Washington des exemples d'investisseurs privés.

Sans verser un seul sou, Airbus détiendra 50,1 % de la société en commandite C Series. La part de Bombardier fléchira à 31 %, alors que celle de l'État québécois devrait reculer à environ 19 %.