Les travailleurs de l'aéronautique sont «découragés et inquiets» par l'incertitude pour leur emploi créé par la décision du département américain du Commerce d'imposer des droits compensatoires préliminaires d'environ 220 % à Bombardier.

Ces droits presque trois fois plus élevés que ceux demandés par Boeing sont «au-delà du réel», a lancé le coordonnateur québécois du syndicat des machinistes, David Chartrand, en entrevue téléphonique à La Presse canadienne.

«C'est carrément du protectionnisme américain, a-t-il ajouté. Ça nous démontre encore une fois les lacunes de l'Accord du libre-échange (nord-américain). Qu'on ait le droit de mettre des tarifs préliminaires... ce qui fait que tous les transporteurs aériens américains vont hésiter à acheter cet avion.»

Les travailleurs souhaitent qu'Ottawa plaide leur cause. «On a vécu la même chose dans l'industrie du bois d'oeuvre, a déclaré M. Chartrand. On espère que le gouvernement ne va pas nous laisser tomber dans l'aérospatiale.»

Unifor a estimé pour sa part dans un communiqué que la décision américaine «met en péril l'industrie de l'aérospatiale en Amérique du Nord».

Le syndicat qui représente 10 000 travailleurs du secteur au Canada implore Boeing de retirer sa plainte.

Le patronat «indigné»

Il a prévenu qu'«une guerre commerciale mettrait en péril l'industrie tant au Canada qu'aux États-Unis», en soulignant qu'Ottawa a menacé d'annuler sa commande de chasseurs Super Hornet du constructeur américain Boeing.

La grappe aérospatiale québécoise a pour sa part déploré l'incertitude et les effets négatifs sur la compétitivité qu'entraîneront ces droits compensatoires.

Par voie de communiqué, Aéro Montréal a appelé Boeing et Bombardier à s'entendre. «C'est dans l'intérêt de toutes les entreprises que les marchés restent ouverts et que la concurrence soit saine», a déclaré la présidente-directrice générale, Suzanne Benoît.

Aéro Montréal a réaffirmé qu'elle estime que les investissements d'Ottawa et de Québec en aérospatiale sont conformes aux règles du commerce international.

Le Conseil du patronat du Québec s'est dit «indigné» de la décision de Washington. «Il s'agit d'une manoeuvre pernicieuse du transporteur américain qui n'a d'autre objectif que d'affaiblir un plus petit concurrent», a affirmé son président-directeur général, Yves-Thomas Dorval, dans un communiqué.

L'association patronale demande à Ottawa de reconsidérer sa commande d'avions de Boeing et de lutter contre «ce type de recours judiciaire frivole dans l'avenir, notamment dans le contexte de la renégociation de l'ALENA».

M. Dorval a souligné que ces droits compensatoires auront des conséquences pour l'ensemble de l'écosystème de fournisseurs qui permettent la construction de ces avions, des deux côtés de la frontière.