Le PDG controversé d'Uber, Travis Kalanick, se retire provisoirement de ses fonctions, une première étape pour le groupe qui tente de se réformer et promet de prendre une série de mesures pour améliorer son image.

«J'ai besoin de prendre du repos» en raison des «événements récents», a écrit mardi le patron d'Uber --en faisant référence au décès accidentel de sa mère le mois dernier -, dans un courriel aux salariés. Il n'a pas précisé la durée de ce congé.

Cette mise à l'écart était indirectement préconisée par le cabinet d'avocats chargé d'enquêter sur la réputation sulfureuse du groupe et dont les recommandations ont également été publiées mardi. Elles ont été approuvées par le groupe, a précisé Uber dans un communiqué.

Ce document incitait Uber à «revoir» les responsabilités de son patron notamment en réfléchissant à celles qui pourraient «être partagées» ou «confiées à d'autres».

M. Kalanick restera néanmoins «disponible» en cas de décisions importantes, a-t-il indiqué dans son email, ajoutant vouloir «réfléchir» et «travailler sur lui-même» pour devenir le patron dont le groupe «a besoin» et reconstituer une équipe dirigeante.

«Il y a évidemment beaucoup de choses dont on peut être fiers mais aussi beaucoup de choses à améliorer», a poursuivi le patron du service de location de voitures avec chauffeur.

Premier accroc aux bonnes résolutions du groupe: un membre du conseil d'administration, l'homme d'affaires David Bonderman, s'est fendu d'une blague sexiste au beau milieu de la réunion de mardi, précisément consacrée aux conclusions de l'enquête interne, selon le Washington Post.

Alors qu'Arianna Huffington - qui siège aussi au conseil - se félicitait du recrutement d'une autre femme (Wan Ling Martello, venant de chez Nestlé), M. Bonderman a répondu que «cela (allait) surtout entraîner davantage de bavardages», selon le quotidien.

Cet épisode, qui tombe au plus mauvais moment, lui valait mardi soir les foudres des internautes sur les réseaux sociaux.

Pratiques déplacées et brutales 

Le groupe fait face à des renvois et démissions en série depuis plusieurs mois sur fond d'accusations principalement de harcèlement ou de sexisme mais aussi de soupçons de vols de technologie. M. Kalanick, comme son bras droit Emil Michael qui a démissionné lundi, est accusé d'avoir personnellement encouragé des pratiques déplacées et brutales.

Après la démission d'une ingénieure affirmant avoir été victime de harcèlement sexuel, le groupe avait mandaté en février un cabinet d'avocats pour examiner les problèmes liés à «l'environnement du travail» et «plus généralement sur la diversité et l'inclusion (sociale) chez Uber».

Les avocats recommandent de reconstituer une équipe dirigeante, dont plusieurs postes sont vacants, et en particulier de trouver un vrai numéro deux.

Ils proposent aussi de renforcer les moyens de faire remonter les problèmes, notamment en renforçant la direction des ressources humaines ou en donnant davantage de pouvoirs et de visibilité au responsable des questions de diversité.

Le cabinet suggère aussi de «restructurer le conseil d'administration» pour accueillir des membres indépendants, et, de façon générale, d'améliorer les procédures «de contrôle interne». Il prône des «formations obligatoires» à la gestion et aux ressources humaines.

Uber va aussi devoir indiquer clairement à ses employés que certains comportements déplacés sont «interdits même s'ils ne sont pas illégaux», en appliquant le principe de la «tolérance zéro» en la matière.

Le groupe a promis dans un communiqué de «mettre en oeuvre ces recommandations», qui doivent permettre de «promouvoir l'équité et la responsabilité et d'établir des pratiques qui empêcheront de répéter les erreurs du passé».

Outre les problèmes de gouvernance, Uber doit aussi faire face à des soucis financiers. La valorisation du groupe non coté est estimée à plus de 70 milliards de dollars, sur la base de sa capacité de levée de fonds auprès des investisseurs. Mais pour l'analyste Trip Chowdry de Global Equities Research, une fourchette de «2 à 3 milliards» de dollars serait plus raisonnable.

Et Uber, créé en 2009, n'est toujours pas rentable. Les comptes du groupe, dont certains éléments ont été communiqués à la presse fin mai, font apparaître une perte de 708 millions de dollars pour les trois premiers mois de l'année, après un «trou» de 2,8 milliards de dollars l'an dernier.