La décision de Bombardier de mettre fin au développement du jet d'affaires Learjet 85, l'an dernier, a fait perdre leur emploi à 1000 travailleurs. Elle a aussi mis en colère des fournisseurs de l'avionneur.

Plus tôt cette année, l'entreprise américaine Rockwell Collins et la société française Safran ont déposé des poursuites totalisant 142,8 millions contre Bombardier. Elles soutiennent que le constructeur doit leur rembourser les sommes qu'elles ont investies dans le développement de composants destinés au Learjet 85.

Rockwell Collins devait fournir la « suite avionique » de l'appareil, soit les systèmes électroniques servant au pilotage. De son côté, Safran devait concevoir et fabriquer les nacelles de l'avion, soit la structure entourant le moteur, ainsi que le système de commande des trains d'atterrissage, de la direction, des roues et des freins. Rockwell réclame 46,7 millions et Safran, 96,1 millions.

Les fournisseurs travaillaient sur le projet depuis plus de sept ans lorsque Bombardier a décidé de le suspendre, en janvier 2015. Du coup, 1000 salariés de l'avionneur perdaient leur emploi à Wichita, au Kansas, et à Querétaro, au Mexique. Le programme a finalement été annulé pour de bon 10 mois plus tard.

UN PRÉTEXTE ?

Pour justifier sa décision, Bombardier a soutenu que les ventes du Learjet 85 étaient insuffisantes. Mais selon Safran, ce n'était là qu'un « prétexte » pour permettre à l'entreprise québécoise de se concentrer sur d'autres projets, plus particulièrement l'avion commercial C Series et les jets d'affaires Global 7000 et 8000. Safran rappelle notamment que la firme américaine Flexjet a passé en 2013 une commande de 60 appareils Learjet 85 d'une valeur de 1,2 milliard US avant rabais.

« La stratégie de Bombardier derrière ce prétexte est on ne peut plus claire : éviter de devoir payer les indemnités prévues aux contrats en cas de résiliation sans cause [termination for convenience]. »

- Allégation contenue dans la poursuite de Safran

Les ententes conclues entre Bombardier et Safran prévoient en effet qu'en cas de force majeure ou de ventes insuffisantes, les dommages que peut réclamer le fournisseur sont « limités de façon substantielle », indique le document déposé en Cour supérieure.

Les parties ont probablement intérêt à s'entendre. Rockwell Collins fournit la suite avionique des avions C Series et Global, tandis que Safran fabrique les nacelles et les trains d'atterrissage des Global.

Rappelons qu'en 2014 et 2015, Bombardier a radié tous les investissements qu'il avait réalisés pour le Learjet 85, soit la coquette somme de 2,5 milliards US.