Alors que les dirigeants du Canadien National célébraient le 20e anniversaire de la privatisation de l'entreprise, hier à Montréal, les investisseurs étaient beaucoup plus moroses, ébranlés par la révision à la baisse des perspectives financières pour 2016.

L'action du CN a chuté de 5,1 % pour clôturer à 78,57 $, à la Bourse de Toronto. Le transporteur ne prévoit plus être en mesure de faire croître son bénéfice par action cette année en raison d'une diminution des volumes de marchandises ainsi que d'un raffermissement du dollar canadien et des prix du carburant.

Mais dans la salle de bal où se tenait l'assemblée annuelle du CN, l'heure était aux réjouissances. Le PDG Claude Mongeau et le chef de la direction financière, Luc Jobin, sont longuement revenus sur la « transformation réussie » de l'entreprise depuis son entrée en Bourse, en novembre 1995.

« À l'époque, nous étions les sempiternels traînards de l'industrie, nous n'avions pas de sentiment d'urgence et nous n'atteignions pas notre plein potentiel », a déclaré M. Mongeau, dont la voix est grandement affaiblie en raison de l'ablation récente d'une tumeur précancéreuse au larynx. Le dirigeant de 54 ans a tenu à souligner la contribution de Paul Tellier, l'ancien greffier du Conseil privé à Ottawa qui a dirigé le CN de 1992 à 2002.

En 20 ans, les revenus de l'entreprise sont passés de 4,2 à 12,6 milliards, et sa valeur boursière, de 2 à 60 milliards. Ses profits nets ont dépassé les 3,5 milliards l'an dernier, un nouveau record.

« En vendant l'entreprise pour 2 milliards, certains diront que le gouvernement fédéral a consenti un rabais aux investisseurs, a lancé Claude Mongeau. Mais à cela, je répondrais que chaque année, nous versons plus de 1 milliard en impôts et en taxes de toutes sortes aux gouvernements du pays. Ceux-ci reçoivent ainsi la moitié de la valeur boursière initiale du CN chaque année, alors l'État a fait une bonne affaire. »

Plusieurs expéditeurs, notamment les agriculteurs de l'Ouest, reprochent toutefois aux sociétés de chemins de fer d'avoir des pratiques monopolistiques, ce qui leur permet d'engranger de juteux profits à leur détriment. M. Mongeau a rétorqué que la « forte rentabilité » du CN découlait de sa « grande efficacité » et lui permettait d'offrir des tarifs parmi les plus concurrentiels du monde.

« L'innovation n'est possible que si les profits sont au rendez-vous, a-t-il soutenu. Les entreprises en difficulté innovent rarement. » - Claude Mongeau, PDG du CN

Le PDG a une fois de plus profité de l'occasion pour demander au gouvernement fédéral d'assouplir les règles qui encadrent l'industrie. En février, un rapport de l'ancien ministre David Emerson a recommandé à Ottawa d'éliminer les plafonds de revenus que les sociétés de chemins de fer peuvent tirer du transport de grains. Les libéraux n'ont pas encore montré leurs couleurs sur cette question.

Le CN est le transporteur ferroviaire le plus performant en Amérique du Nord depuis des années, mais le Canadien Pacifique, désormais dirigé par Hunter Harrison, ancien PDG de l'entreprise montréalaise, est en train de combler l'écart. « Nous les voyons très près dans le rétroviseur, a admis Claude Mongeau. Nous allons faire en sorte qu'il ne soit pas facile pour eux de nous rattraper. »

Le réseau du CN couvre huit provinces canadiennes et 16 États américains, et permet Chaque année, il permet de transporter pour 250 milliards de marchandises de toutes sortes.