Air Canada a déposé une requête à la Cour suprême pour en appeler d'un jugement qui l'oblige à maintenir des centres d'entretien d'avions à Montréal et à Winnipeg.

« C'est une mauvaise nouvelle pour nous, a déploré le coordonnateur québécois de l'Association internationale des machinistes et des travailleurs de l'aérospatiale, David Chartrand, dans une entrevue téléphonique avec La Presse Affaires. Ça nous fait attendre encore plus longtemps pour connaître le résultat final. »

Le dossier est lié à la soudaine fermeture de l'entreprise d'entretien d'avions Aveos, qui a entraîné la perte de 2700 emplois, dont 1800 dans la région de Montréal, en mars 2012.

« Ç'a été une catastrophe, a lancé M. Chartrand. Plusieurs ne s'en sont jamais remis. »

Il faut remonter à 1988 pour aller à la source du conflit, soit l'entrée en vigueur de la loi qui permettait la privatisation d'Air Canada, la Loi sur la participation publique au capital d'Air Canada. Cette loi oblige le transporteur à « maintenir des centres de révision et d'entretien dans les villes de Winnipeg et de Mississauga et dans la Communauté urbaine de Montréal ».

La filiale fait faillite

Dans le cadre de sa restructuration, en 2004, Air Canada a créé une filiale distincte d'entretien et de révision, ACTS (Air Canada Technical Services), qui a fini par se détacher totalement et prendre le nom d'Aveos.

Lorsque Aveos a fermé ses portes et fait faillite en 2012, Air Canada a confié de petits contrats d'entretien à des entreprises québécoises comme Avianor et Premier Aviation, mais elle a transféré l'essentiel de ses gros contrats aux États-Unis.

Le gouvernement du Québec a intenté une poursuite contre Air Canada en avril 2012, imité par le gouvernement du Manitoba.

En cour, le transporteur a fait valoir qu'il faisait encore de l'entretien en ligne à Montréal et Winnipeg. Il s'agit toutefois de travaux légers entre les vols et pendant la nuit.

En février 2013, le juge Martin Castonguay, de la Cour supérieure du Québec, a donné raison aux gouvernements du Québec et du Manitoba.

Le 3 novembre dernier, la Cour d'appel du Québec a confirmé cette décision.

« À partir du moment où les affaires d'Air Canada la mènent à fermer ce centre ou à en réduire les activités de façon à ce qu'elles n'équivaillent plus à celles qui y avaient cours en 1998, elle enfreint la loi. »

- Extrait de la décision de la juge Marie-France Bich de la Cour d'appel 

Air Canada avait 60 jours pour décider d'en appeler du jugement. Elle a déposé une requête en autorisation à la Cour suprême le 30 décembre dernier.

« Nous demandons la permission de porter en appel devant la Cour suprême du Canada la décision rendue par la Cour d'appel du Québec afin que des explications soient fournies au sujet d'importantes questions soulevées par cette décision », a déclaré la porte-parole d'Air Canada Isabelle Arthur, sans vouloir faire de commentaires supplémentaires.

David Chartrand croit que plus Air Canada fait traîner les choses, plus elle peut faire valoir qu'il lui est impossible de récupérer l'expertise et l'équipement nécessaires pour remettre en place les centres d'entretien.

« Air Canada a l'intention de plaider sa propre turpitude », a-t-il lancé.

Le syndicat a une autre crainte : que le transporteur fasse pression sur le nouveau gouvernement libéral à Ottawa pour faire modifier la loi qui l'oblige à maintenir ces centres.

« Nous avons écrit au premier ministre Justin Trudeau, au ministre des Transports Marc Garneau et à plusieurs députés pour leur demander de faire attention à ça, de s'assurer de ne pas changer la loi », a déclaré M. Chartrand.