Au terme d'une réunion tenue hier à Montréal, l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) a mis sur pied un groupe de travail dans le but d'éviter une répétition de la tragédie du vol MH 17 de Malaysia Airlines, abattu par un missile en Ukraine le 17 juillet, qui a causé la mort de 298 personnes.

La priorité du comité sera de trouver des façons d'améliorer la transmission de l'information sur la sécurité des espaces aériens aux compagnies aériennes, a indiqué le secrétaire général de l'OACI, Raymond Benjamin, au cours d'une conférence de presse au siège de l'institution onusienne, rue University. L'OACI tiendra un sommet international sur la question en février. Pour Tony Tyler, PDG de l'Association internationale du transport aérien (IATA), qui représente les transports aériens du monde entier, le tir qui a provoqué l'écrasement du Boeing 777 n'était rien de moins qu'«une attaque contre l'ensemble de l'industrie».

«Les avions civils sont des instruments de paix qui ne devraient jamais être la cible d'armes de guerre», a-t-il martelé.

L'OACI et les représentants de l'industrie ont toutefois assuré que la catastrophe n'avait pas été le résultat d'un système aérien «brisé». «Le défi, c'est de corriger la ou les lacunes qui ont fait en sorte que cette tragédie a pu se produire», a souligné M. Tyler.

La tâche ne sera toutefois pas facile. Ce sont les États, et non l'OACI, qui ont la responsabilité d'établir si les espaces aériens sont sûrs ou non. Des pays en guerre, comme l'Ukraine, Israël ou la Syrie à l'heure actuelle, sont potentiellement en situation de conflit d'intérêts. «Nous devons tenir compte du fait que certains États n'ont peut-être pas la capacité ou la volonté de fournir du renseignement fiable», a relevé Angela Gittens, directrice générale de l'Airports Council International.

«Pour être franc, le temps est venu pour les États d'améliorer leur bilan pour ce qui est d'assurer la sécurité et la sûreté de leurs espaces aériens», a déclaré Jeff Poole, directeur général de CANSO, l'organisation internationale regroupant les services de navigation aérienne.

L'OACI pourrait fournir un meilleur encadrement et proposer l'adoption de «meilleures pratiques» aux pays, a avancé le président du conseil de l'institution, Olumuyiwa Benard Aliu.

Dans un premier geste, M. Benjamin a envoyé une lettre aux États la semaine dernière pour leur rappeler leurs responsabilités en ce qui a trait aux zones de conflit.

Tony Tyler a assuré qu'il n'était pas question d'obliger les pays à partager des secrets. «Les informations confidentielles peuvent être expurgées de façon à ne fournir que les données essentielles aux compagnies aériennes», a-t-il noté.

L'IATA a mis en garde l'OACI contre une «surréglementation» qui pourrait avoir des «effets non désirés». M. Tyler a reconnu que les compagnies aériennes tenaient à conserver le pouvoir de décider seules des routes qu'elles empruntent.

La semaine dernière, l'association représentant les pilotes de ligne européens (ECA) a suggéré que des organisations internationales jouent un rôle dans la détermination du risque des espaces aériens, mais hier, l'OACI n'a pas voulu réclamer ce rôle. «Nous ne sommes pas en concurrence avec nos États membres», a dit M. Aliu.

L'industrie a par ailleurs convaincu l'OACI de demander aux Nations unies d'établir un cadre juridique pour les missiles antiaériens, qui ne font actuellement l'objet d'aucune convention internationale, contrairement aux armes biologiques, chimiques ou nucléaires.

Tous s'entendent pour dire qu'une meilleure concertation mondiale réduira la possibilité qu'un avion soit abattu par un missile, mais encore faut-il que l'information disponible soit utilisée. Rappelons que contrairement à Malaysia Airlines, plusieurs transporteurs aériens évitaient de survoler une bonne partie de l'Ukraine, et ce, des semaines avant l'accident.

«La perfection absolue est un concept illusoire, plus particulièrement quand il s'agit d'êtres humains», a rappelé M. Poole.