Airbus pourrait profiter du nouveau report du premier vol de la CSeries. «Airbus va saisir toutes les occasions possibles pour écraser la compétition», a déclaré l'analyste américain Richard Aboulafia, de Teal Group, en entrevue téléphonique avec La Presse Affaires.

Bombardier [[|ticker sym='T.BBD.B'|]] a fait savoir hier que les essais portant sur la validation et l'intégration de l'ensemble des systèmes de la CSeries prenaient plus de temps que prévu. L'avionneur a donc remis «au cours des prochaines semaines» le premier vol de la CSeries. Ce vol inaugural devait avoir lieu avant la fin du mois de juillet.

Ce nouveau délai entraînera également un report de l'entrée en service de la nouvelle famille d'appareils de 110 à 135 passagers. Règle générale, l'entrée en service a lieu un an après le premier vol.

Selon l'échéancier original, la CSeries devait prendre son envol avant la fin de 2012. Bombardier a reporté cet événement de six mois pour le remettre à la fin de juin 2013. Un autre délai a forcé l'avionneur à reporter le vol inaugural à la fin de juillet.

Selon Richard Aboulafia, le nouveau retard pourrait avoir une incidence sur les clients. «Lorsqu'on entre dans un nouveau marché, il faut faire attention, la confiance des clients est essentielle», a-t-il déclaré.

Il a noté que deux des principaux clients de la CSeries, Republic et Lufthansa, avaient également passé des commandes pour l'Airbus A320 Neo, un appareil un peu plus gros que la CSeries. Si l'entrée en service du nouvel appareil de Bombardier retarde trop, ces clients pourraient décider d'annuler leurs commandes et d'acquérir plutôt des appareils supplémentaires d'Airbus.

«Ces clients ont un plan B, offert par un compétiteur très agressif qui pourrait même aller jusqu'à payer les pénalités pour eux», a déclaré M. Aboulafia.

Peu d'agressivité

L'analyste estime que depuis le début du programme de la CSeries, Bombardier se montre peu combatif vis-à-vis de ses concurrents. Selon lui, l'avionneur devrait offrir des rabais à ses clients, des garanties additionnelles et du financement, si nécessaire.

«Ils m'ont dit qu'ils pourraient le faire dans l'avenir, mais qu'ils n'en étaient pas là, a déclaré M. Aboulafia. C'est possible. Mais c'est aussi possible qu'ils n'aient pas la force financière pour le faire et qu'ils aient sous-estimé les ressources nécessaires pour ce projet. J'espère que c'est la première hypothèse qui est la bonne.»

Bombardier a soutenu hier que l'intégration des moteurs et du groupe auxiliaire de bord (un petit moteur qui produit de l'énergie) se déroulait bien, tout comme la validation des logiciels et des commandes de vol électriques.

Toutefois, les derniers essais avant vol prennent plus de temps que prévu.

«Les dernières étapes sont plus techniques, a indiqué le porte-parole de Bombardier Aviation commerciale, Marc Duchesne. Souvent, ce sont des technologies entièrement nouvelles qu'il faut tester de façon très intense.»

Les déboires du Boeing 787, le Dreamliner, ont également incité Bombardier à être encore plus méticuleux.

«Il ne faut pas se leurrer, quand on voit ce qui se passe chez Boeing avec le 787. Nos clients nous demandent de nous assurer de bien faire les choses de façon à ce que tout soit impeccable lors de l'entrée en service, a déclaré M. Duchesne. Ils ne veulent pas avoir de pépins.»

L'analyste Walter Spracklin, de Marchés des capitaux RBC, ne croit pas que le nouveau report du premier vol de la CSeries aura des conséquences importantes sur le coût de développement du programme ou sur la valeur du titre de Bombardier.

Hier, l'action de catégorie B de Bombardier a perdu 6 cents pour clôturer à 5,01$ à la Bourse de Toronto. C'est une diminution de 1% à peine.

Toutefois, M. Spracklin craint que ce nouveau délai n'entache la crédibilité de la direction de Bombardier.

Dans un rapport d'analyse, il s'inquiète également au sujet de l'autorisation de vol d'essai que Bombardier doit aller chercher auprès de Transports Canada.

Bombardier a déclaré que ce processus progressait de façon constante et que l'autorisation était attendue au cours des prochaines semaines.

M. Spracklin a écrit que cette question demeurait un facteur de risque pour le premier vol parce que les autorisations recherchées portaient sur des technologies innovantes.