Airbus se prépare à revenir, peut-être d'ici deux à trois ans, à la technologie des batteries au lithium qui ont immobilisé pendant des mois les long-courriers 787 de son concurrent Boeing, d'après des sources proches de l'avionneur.

Airbus avait renoncé en février à ces batteries au lithium, qui permettent d'alléger l'avion, pour l'entrée en service de son futur long-courrier A350, prévue pour la fin 2014, revenant à la technique éprouvée des batteries au nickel-cadmium.

Le 787 «Dreamliner» de Boeing, entré en service fin 2011, était alors interdit de vol depuis un mois à la suite de problèmes de surchauffe de ses nouvelles batteries au lithium.

Depuis, l'agence fédérale de l'aviation américaine (FAA) a autorisé la reprise des vols commerciaux, après que Boeing a modifié ses batteries, notamment avec un caisson de confinement pour éviter la propagation d'un feu éventuel.

«Airbus travaille avec la FAA pour voir dans quelle mesure elle finira par valider la technologie du lithium», a indiqué une source proche d'Airbus.

Une fois la décision prise, des batteries au lithium pourraient être installées sur l'A350.

«Il y aura des avions au nickel-cadmium et ensuite une deuxième génération au lithium», a déclaré une de ces sources. «Ça ne prendra pas des années. On peut imaginer que ce sera d'actualité en 2015 ou 2016».

Les batteries au lithium ont surtout l'avantage d'être moins massives que les batteries nickel-cadmium pour une énergie équivalente. Elles permettent donc de réduire le poids d'un avion et sa consommation de carburant.

Mais avec le caisson de confinement qu'il installe sur ses 787, Boeing a réduit à presque rien l'écart de poids entre les deux types de batteries, selon un spécialiste de l'aéronautique.

«Le constructeur américain n'avait pas le choix, sinon c'était au moins un an d'interruption de vol pour le 787, a-t-il poursuivi. Il faut entre 12 et 18 mois pour faire +qualifier+ (certifier) une batterie par les autorités et mettre en place une chaîne de production».

Comme tous les équipements d'un nouvel avion, les batteries subissent des tests de qualification, en laboratoire, au banc d'essai et puis en vol pour démontrer à la FAA et son homologue l'Agence européenne de sécurité aérienne (AESA), qu'elles répondent aux normes prescrites.

En service depuis longtemps, les batteries au cadmium doivent répondre à des normes techniques établies. De nouveaux équipements comme les batteries au lithium doivent en revanche répondre à des conditions spéciales, modifiables à tout moment, a expliqué Rachel Daeschler, responsable de la certification des avions de transport à l'AESA.

Dès qu'une batterie de 787 a pris feu, «les autorités ont commencé à parler de modification des critères de certification», a déclaré une source proche d'Airbus.

L'avionneur n'a pas voulu prendre le risque de devoir changer de technologie au cours du développement de l'A350, alors qu'il disposait du temps nécessaire pour faire qualifier une batterie au nickel-cadmium.

«On ne sait pas ce que la FAA va demander pour les batteries au lithium dont la fiabilité n'est pas encore démontrée», a ajouté le spécialiste.

La FAA et l'AESA ont autorisé la reprise des vols de 787. La compagnie japonaise All Nippon Airways (ANA), qui en possède le plus, va les remettre en service à partir du 1er juin.

Mais ce spécialiste trouve «extrêmement dérangeant» qu'on n'ait pas trouvé la cause de l'incident. «Quand vous ne savez pas pourquoi un élément a failli, vous ne pouvez pas garantir que ça ne se reproduira pas», dit-il.

Cependant «il suffirait que quelqu'un dise à l'industrie: on a trouvé pourquoi elles ont pris feu et on sait vous fabriquer une batterie qui ne prendra pas feu, ça changerait tout».