Un apprentissage un peu plus long que prévu en Chine a amené Bombardier (T.BBD.B) à ramener à son usine de Saint-Laurent la fabrication de certains composants de la CSeries.

Il s'agit toutefois d'une situation temporaire et après quelques unités, la fabrication de ces composants sera retournée en Chine, comme prévu.

«Nous ne changeons pas de stratégie, nous ne sortons pas de la Chine», a affirmé le président de Bombardier Aéronautique, Guy Hachey, dans une entrevue à La Presse Affaires à Londres, à quelques heures de l'ouverture du salon aéronautique de Farnborough, prévue pour ce matin. Bombardier s'amène d'ailleurs à Farnborough en position de force. Hier, l'avionneur a annoncé une commande conditionnelle pour 15 appareils de la CSeries. Le client a préféré ne pas être identifié pour des raisons concurrentielles.

Au prix de détail, la valeur de cette transaction s'établit autour de 1,02 milliard $ US.

Samedi, Bombardier a annoncé que China Express Airlines avait confirmé sa commande pour six biréacteurs régionaux CRJ900.

Bombardier avait décidé de faire fabriquer d'importants composants de la CSeries en Chine pour justement favoriser son accès au marché chinois. L'avionneur avait ainsi confié à Shenyang Aircraft Corporation (SAC) le soin de fabriquer les trois sections du fuselage.

Bombardier a toutefois décidé depuis de faire une partie du travail à Saint-Laurent et à Belfast pour les premières unités.

«À l'origine, nous n'avions pas prévu de faire ça, mais lorsque nous avons vu les difficultés [en Chine] au début, lorsque nous avons vu que la courbe d'apprentissage serait plus longue que prévu, nous avons pris des dispositions», a déclaré M. Hachey, qui arrivait justement de la Chine à bord d'un biréacteur d'affaires Global de Bombardier.

C'est ainsi que l'usine de Saint-Laurent, qui est déjà responsable de la cabine de pilotage, assemblera pendant une courte période de temps la section avant et arrière du fuselage.

«Ça crée des emplois temporaires à Montréal», a affirmé M. Hachey

Il a rappelé que Bombardier avait suivi la même stratégie pour le fuselage de l'appareil turbopropulsé Q400.

«Maintenant, tout le fuselage du Q400 est assemblé en Chine, à très haute qualité, et nous leur avons donné plus de travail», a-t-il souligné.

Il s'attend au même phénomène pour la CSeries.

«Une fois qu'ils ont appris, ils font l'ouvrage très bien à des coûts très avantageux», a-t-il affirmé. M. Hachey a également souligné que Bombardier avait adopté une stratégie similaire pour d'autres fournisseurs.

Responsable des commandes de vol

«Il y a d'autres fournisseurs qui ont eu de plus grandes difficultés (que la Chine)», a-t-il indiqué.

Bombardier a notamment dû envoyer des équipes chez Parker Aerospace. L'entreprise américaine, très expérimentée, est responsable des commandes de vol électronique avec Rockwell Collins.

«Je suis très confiant en ce qui concerne les structures, en ce qui concerne la Chine», a déclaré M. Hachey.

Il a fait valoir que le partenaire chinois de Bombardier avait conservé un élément important du fuselage de la CSeries et qu'il devrait livrer une unité d'ici deux semaines. Il s'agira d'ailleurs de la première composante majeure de la CSeries qui arrivera à l'usine d'assemblage de Mirabel.

«Je ne m'inquiète pas pour l'assemblage de l'avion, c'est plus du côté de l'intégration des systèmes que ça pourrait être serré, a-t-il déclaré. Mais nous visons toujours le premier vol d'ici le Nouvel An.»

Si certains observateurs ont émis des doutes au sujet de l'échéancier de Bombardier pour la CSeries, d'autres s'interrogent sur l'état des commandes. La venue hier d'un nouveau client, le 12e, devrait aider Bombardier à répondre à ces critiques.

Un climat économique difficile

M. Hachey a rappelé à La Presse Affaires que le climat économique était difficile dans plusieurs régions du globe. Il a également fait valoir que moins de six mois avant le premier vol, certains clients potentiels pourraient être tentés d'attendre de voir l'appareil prendre réellement son envol avant de passer une commande.

«C'est sûr que nous pourrions faire avancer les choses plus rapidement si nous étions moins particuliers au niveau des prix, a indiqué le président de Bombardier Aéronautique. Là-dessus, nous sommes critiqués, on dit que nous sommes trop durs. Mais nous croyons que l'appareil apporte beaucoup de valeur.»

Selon lui, Bombardier n'a pas à brader cette valeur.

«Oui, nous regardons pour des prix de lancement, mais nous ne donnons pas l'avion, a-t-il lancé. À long terme, ce n'est pas une bonne stratégie: ça réduit la valeur résiduelle de l'avion, ça réduit les attentes.»