Les passagers d'Air Canada et d'Air Transat volant entre le Canada et l'Europe ont droit à un répit.

Les deux sociétés n'ont pas ajusté leurs tarifs pour tenir compte de l'inclusion forcée des transporteurs aériens non européens dans le système d'échange de quotas mis en place par l'Union européenne pour réduire les émissions de gaz à effet de serre.

Aux États-Unis, Delta, United et Continental ont annoncé une surcharge de trois dollars par vol simple en provenance ou à destination de l'Europe. Les grands transporteurs chinois, eux, ont fait savoir qu'ils n'avaient pas l'intention de se plier aux exigences de ce système.

«Nous analysons l'impact de ces nouvelles réglementations et n'avons pas encore pris de décision quant à la tarification», a déclaré la porte-parole d'Air Canada, Isabelle Arthur, dans un courriel envoyé à La Presse Affaires.

La porte-parole de Transat, Mme Debbie Cabana, a indiqué que l'entreprise analysait également la situation.

«Nous n'avons pas de changement au niveau de la tarification, a-t-elle déclaré dans une brève entrevue téléphonique. Nous continuons à faire des pressions à travers le Conseil national des lignes aériennes du Canada (CNLA).»

L'Union européenne a provoqué une levée de boucliers à l'échelle internationale lorsqu'elle a décidé de soumettre tous les transporteurs aériens à une taxe sur le carbone pour les vols en provenance ou à destination de l'Europe, que ces transporteurs soient européens ou non, à partir du premier janvier 2012.

Cette taxe s'applique sur l'ensemble des vols, et pas seulement sur la portion au-dessus de l'Europe.

Les pays non européens ont dénoncé cette initiative parce qu'il s'agissait selon eux d'une décision unilatérale et que sa portée extraterritoriale était contraire au droit international.

Dans une lettre envoyée à un représentant de l'Union européenne, le ministre canadien des Transports Denis Lebel a rappelé que le Canada partageait l'objectif de réduction des gaz à effet de serre, mais qu'il était préférable d'agir multilatéralement, par le biais de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI).

Recours aux tribunaux

Le CNLA s'est joint à son homologue américain, Airlines for America, et à l'Association du transport aérien international (IATA) pour contester l'initiative européenne devant la Cour de justice de l'Union européenne. Le 21 décembre dernier, le tribunal a rejeté leurs arguments et a donné raison à l'Union européenne.

Airlines for America étudie la possibilité de porter le conflit devant l'English High Court. Pour sa part, le CNLA croit que la question se jouera essentiellement sur la scène politique.

«Nous sommes loin d'en avoir fini avec cela, a affirmé le président du CNLA, George Petsikas, dans une entrevue téléphonique avec La Presse Affaires. Nous verrons ce qui sortira des discussions à l'OACI au cours des prochains mois. Nous continuons également les discussions avec le gouvernement canadien pour voir la façon la plus efficace de convaincre les Européens de la nécessité de négocier une solution globale.»

Aux États-Unis, la Chambre des représentants a adopté un projet de loi qui interdirait aux transporteurs américains de participer au système européen d'échange de quotas. Un projet de loi similaire déposé au Sénat n'a toutefois pas recueilli les appuis nécessaires pour être adopté.

Selon une publication spécialisée, le Point Carbon News, le département américain des Transports a demandé à six transporteurs américains et à neuf transporteurs européens de lui transmettre les données qui serviront au calcul de la taxe sur le carbone. Les observateurs estiment que Washington pourrait utiliser ces données pour mesurer les torts causés aux sociétés américaines et mettre en place des mesures de représailles contre l'Europe.

Du côté canadien, on n'a pas l'intention de mettre en place de telles mesures pour l'instant.

Formalités administratives

«Nous espérons que les mécanismes internationaux vont fonctionner», a indiqué le porte-parole du ministère des Transports, Patrick Charette, en entrevue téléphonique.

En attendant, les transporteurs canadiens vont se soumettre aux exigences du système européen, mais à leur corps défendant, a indiqué M. Petsikas.

«Pour l'instant, on parle surtout de formalités administratives, a-t-il précisé. Les sociétés doivent mettre en place les processus pour déposer leurs chiffres de consommation de carburant et d'émission de gaz à effet de serre. Il n'y a pas d'impact matériel. L'Union fera des calculs et nous enverra la facture au cours du premier trimestre de 2013.»

La première année, l'Union européenne fournira aux sociétés aériennes des crédits équivalant à 85% des émissions moyennes réalisées entre 2004 et 2006. Les sociétés aériennes devront payer pour obtenir les crédits au-delà de ce pourcentage.