Le gouvernement Harper a réussi à empêcher la grève des agents de bord d'Air Canada, provoquant la colère du syndicat et du NPD, qui craint que de plus en plus de patrons demandent maintenant l'intervention d'Ottawa pour ne pas avoir à s'entendre avec leurs employés.

Après avoir rejeté deux ententes de principe avec l'employeur, les agents de bord, membres du Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP), avaient annoncé qu'ils déclencheraient la grève dans la nuit d'hier à aujourd'hui.

Mais la ministre du Travail, Lisa Raitt, leur a coupé l'herbe sous le pied en confiant leur dossier au Conseil canadien des relations industrielles. Ce tribunal devra déterminer si le dossier est dans une impasse. S'il estime que c'est le cas, le gouvernement lui ordonne d'imposer une nouvelle convention ou un arbitrage qui fixerait les conditions de travail.

La ministre a aussi demandé au Conseil de déterminer quels services essentiels devraient être maintenus en cas de conflit de travail chez Air Canada. Une audience est prévue demain à cette fin.

Pendant que le tribunal se penche sur cette question, il est interdit de déclencher un arrêt de travail. «Notre gouvernement s'est vu confier un mandat clair, celui de protéger l'économie et les emplois du Canada», a commenté la ministre pour expliquer sa décision. Mme Raitt s'est dite «préoccupée» par le fait que les agents de bord ont rejeté deux projets de règlement recommandés par leur comité de négociation.

Le syndicat affirme que ses membres ont reçu la nouvelle avec beaucoup de frustration. Il craint que les conservateurs tentent de gagner du temps jusqu'au retour des députés en Chambre lundi prochain, afin de pouvoir faire adopter une loi spéciale.

«L'employeur et le bureau de la ministre semblent s'entraider», déplore Robert Lamoureux, porte-parole du SCFP.

Le député néo-démocrate Yvon Godin s'est dit très inquiet de voir le gouvernement intervenir dans une entreprise privée pour «taper sur les travailleurs», selon son expression.

«Avec le message que la ministre envoie, les autres employeurs vont dire «Moi aussi je veux une intervention!», et ils vont arrêter de négocier avec leurs travailleurs», s'inquiète-t-il.

M. Godin croit qu'historiquement, le droit à la grève, au lock-out et à la négociation collective a contribué à éliminer la violence dans les conflits de travail en permettant de régler les différends de façon pacifique.

«Ça a empêché des bains de sang!», insiste-t-il.

La porte-parole de la ministre Lisa Raitt n'a pas rappelé La Presse.