Déjà empêtrée dans des litiges à cause des problèmes de bruit et d'une querelle sur sa gouvernance, la direction de l'aéroport de Saint-Hubert fait face à une troisième poursuite en un peu plus d'un an. Une entreprise d'aviation l'accuse de vouloir saboter une entente de principe, qui lui aurait permis de louer un terrain afin d'agrandir ses installations.

Avtech, propriété des hommes d'affaires Denis Charest et Serge Charron, loue un hangar situé à l'aéroport depuis plusieurs années. Elle sous-loue ces installations au transporteur régional Pascan, une société soeur qui appartient à M. Charron.

Les affaires de Pascan se portent bien. L'entreprise possédait huit avions en 2005. Elle en exploite maintenant 21. La croissance a entraîné toutefois un problème de taille: l'entreprise a cruellement besoin d'espace supplémentaire pour garer et entretenir ses appareils. Avtech souhaite louer un terrain adjacent à ses installations afin d'y construire un nouveau hangar et le sous-louer à sa compagnie soeur.

Mais voilà, l'entreprise est incapable de signer un bail. Selon une poursuite qu'elle a déposée en Cour supérieure, la semaine dernière, c'est en raison de la «mauvaise foi» de l'organisme sans but lucratif qui gère l'aéroport, DASH-L.

Avtech dit avoir conclu une entente de principe pour modifier son bail en novembre dernier. Mais depuis, affirme-t-elle dans sa requête, le conseil d'administration de DASH-L multiplie les tentatives pour empêcher la ratification du pacte.

Selon Avtech, l'administration agit ainsi sous l'influence de la Ville de Longueuil dans le but de favoriser une entreprise qui souhaite bâtir un aérogare sur les terrains de l'aéroport, Aérocentre YHU Longueuil. Cette société appartient à l'homme d'affaires Gordon Livingstone, qui est membre du conseil d'administration de DASH-L.

«Non seulement la défenderesse DASH-L a refusé de donner suite à l'entente pour raison de conflit d'intérêts, mais depuis elle a tout fait afin de retarder le processus d'approbation de ce bail en faisant des demandes illégales, sous la direction de la Ville de Longueuil, démontrant son hostilité et sa mauvaise foi à l'égard de la demanderesse ou de Pascan», allègue la poursuite.

En appui à sa requête, l'entreprise a présenté à la Cour un document signé par son président et par l'ancien directeur général de DASH-L, Sylvain Gonthier. On peut y lire que «la signature du directeur général entraînera la responsabilité de DASH-L lorsque les termes du bail seront approuvés par la majorité des membres du conseil d'administration de DASH-L». Or, le conseil a rejeté cette entente.

Le président de DASH-L, Pierre-Hugues Miller, se dit tout à fait disposé à louer le terrain à Avtech et Pascan, et affirme que le refus du conseil n'a rien à voir avec la construction d'une nouvelle aérogare. L'organisme sans but lucratif, qui perd environ 300 000$ par année, souhaite imposer une surcharge à l'ensemble de ses locataires afin de couvrir l'entretien des pistes, du matériel et des bâtiments de l'aéroport. Or, dit M. Miller, Avtech et Pascan refusent de payer ce supplément.

«Ce qu'ils sont en train de faire, dans le cas d'Avtech, c'est qu'à chaque fois qu'on tente d'exercer nos pouvoirs de gestion, ils tentent de miner nos pouvoirs de gestion», déplore M. Miller.

Avtech a intenté sa requête 24 heures avant que la direction de DASH-L donne son aval au projet d'Aérocentre YHU Longueuil. L'entreprise a ratifié un bail emphytéotique de 60 ans, et elle s'engage à investir 20 millions pour bâtir une aérogare sur le site de l'aéroport. DASH-L a investi 3 millions pour acquérir une participation dans le projet, une transaction qui a été mise en cause par une vérification de la firme KPMG. L'organisme s'est depuis retiré de la coentreprise.

Trois poursuites

Les hommes d'affaires Denis Charest et Serge Charron, qui sont associés à Avtech et Pascan, n'en sont pas à leurs premiers démêlés avec la direction de DASH-L. Ils sont maintenant impliqués dans trois poursuites contre l'organisme. La première, qui est actuellement devant la Cour d'appel, vise à bloquer un règlement qui aurait limité les heures de décollage et d'atterrissage à l'aéroport pour limiter le problème du bruit. La seconde vise à empêcher une réforme administrative qui pourrait limiter l'influence des entreprises d'aviation dans l'administration de DASH-L.