Après le Plan Nord du gouvernement Charest, Raymond Chrétien se démène pour faire avancer son Plan Sud.

Comme le premier, il s'agit d'un chantier dont la durée pourrait s'étaler sur plusieurs décennies.

Il consiste à intégrer Montréal aux grands couloirs ferroviaires nord-américains où rouleraient des trains à haute vitesse (THV) sur des voies réservées pour la plus grande partie des trajets.

Loin d'être une idée neuve, relier Montréal à New York ou Boston par une liaison plus rapide est ranimée depuis que le président Barack Obama a fait de la modernisation des infrastructures ferroviaires un des projets Legacy.

«C'est un avantage et un inconvénient à la fois, a expliqué M. Chrétien dans un atelier de la Conférence de Montréal. Un avantage parce que c'est la première fois en 100 ans qu'un président place les chemins de fer parmi ses priorités et un inconvénient parce que ça devient un enjeu politique. Au Canada, ce n'est pas une priorité pour l'instant.»

L'émissaire du gouvernement du Québec pour les liaisons ferroviaires avec les États-Unis a précisé que le Québec fait partie du comité de travail mis sur pied pour tenter de concrétiser le projet qui devrait faire l'objet d'un protocole d'entente imminent.

L'objectif à court terme de l'émissaire est d'obtenir l'accord américain pour un prédédouanement à la Gare centrale, comme il en existe un à l'aéroport Pierre-Elliott-Trudeau.

Ce n'est toutefois pas le principal obstacle, selon M. Chrétien. Il signale que le couloir Albany-Montréal n'est pas encore désigné parmi les liaisons retenues pour lesquelles Washington a réservé une enveloppe de 53 milliards US.

Avant tout, il faudra parvenir à intégrer le Plan Sud au nouveau périmètre de sécurité Canada-États-Unis qui représente une négociation ambitieuse. «Le grand problème, c'est l'équilibre précaire entre la sécurité et la fluidité de la frontière, juge M. Chrétien. Pour le Canada, la souveraineté est très importante. Il faudra trouver une balance entre le commerce et la sécurité.»

Le délégué général du Québec à New York, John Parisella, a pour sa part rappelé que le nord-est des États-Unis pèse gros pour les exportations québécoises.

Il a aussi expliqué qu'il ne faut pas rêver à un TGV comme on en voit en France, en Espagne et même au Maroc. Le THV dont il est question aura des pointes d'un peu plus de 200 km/h, mais il ralentira jusqu'à 100 km lorsqu'il empruntera des tronçons partagés avec les trains de marchandises. Outre ses moindres coûts, ce partage est incontournable en raison de l'impossibilité de bâtir de nouvelles voies qui traverseraient le parc Adirondack, protégé par la constitution de l'État de New York.

Cela dit, l'amélioration du service permettrait de réduire la durée de la liaison entre Montréal et New York qui prend 11 heures, comparativement à 5 pour le trajet aérien, si on inclut le transport des aérogares aux centres-villes.

Entre-temps, l'émissaire cherche aussi à obtenir le rétablissement de la liaison entre Montréal et St. Albans, au Vermont.

Bien que les embûches soient nombreuses, M. Chrétien s'est montré optimiste. Les relations canado-américaines sont bonnes maintenant et le retard américain dans le transport ferroviaire est patent. «Pour les Américains, ce doit être une question de fierté: comment peuvent-ils traîner la patte dans le transport passager? Ils ne sont ni deuxièmes ni troisièmes, ils ne sont même pas dans la course.»