Si le projet de remplacement des vieux hélicoptères Sea King des Forces canadiennes a donné des maux de tête au gouvernement canadien, il en donne maintenant à Sikorsky, qui livre les nouveaux hélicoptères à perte.

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«Le programme des hélicoptères maritimes canadiens continue de freiner Sikorsky, a déclaré Gregory Hayes, le chef de la direction financière de la société mère de Sikorsky, United Technologies Corporation (UTC), au cours d'une téléconférence portant sur les résultats du premier trimestre de l'entreprise hier. Nous devrions livrer trois hélicoptères au cours du deuxième trimestre. Nous perdons de 10 à 12 millions de dollars sur chacun de ces appareils. Cela mettra beaucoup de pression sur les résultats de Sikorsky au deuxième trimestre.»

UTC et Sikorsky n'ont pas rappelé La Presse Affaires pour expliquer la cause de ces pertes. Selon des documents du Conseil du Trésor du Canada, chaque hélicoptère coûte en moyenne 54,6 millions de dollars.

Sikorsky a livré à perte un premier hélicoptère au Canada en janvier 2011. Il s'agit d'un appareil «provisoire», qui n'est pas doté de tous les équipements prévus au contrat initial. La livraison des premiers appareils entièrement équipés n'aura lieu qu'en 2012. À l'origine, les Forces canadiennes devaient prendre possession des hélicoptères pleinement fonctionnels en 2005.

Un véritable feuilleton

Le projet de remplacement des hélicoptères Sea King constitue un véritable feuilleton. Lancé sous les conservateurs en 1986, il a donné lieu à un premier contrat avec AgustaWestland. Le gouvernement libéral de Jean Chrétien a résilié ce contrat à son arrivée au pouvoir en 1993, subissant des frais de résiliation de 478 millions de dollars. Il a lancé un nouveau processus en 1995 pour finalement retenir Sikorsky en 2004. Ottawa a commandé 28 hélicoptères CH-148 Cyclone, une version militaire d'un modèle civil, le S-92.

Dans son rapport de l'automne dernier, la vérificatrice générale, Sheila Fraser, a affirmé que le gouvernement avait sous-estimé les travaux de mise au point de l'appareil, qui ont occasionné plusieurs délais. Le développement du logiciel du système de mission a notamment donné du fil à retordre à Sikorsky. En juin 2010, le manufacturier et Ottawa se sont finalement entendus pour que l'entreprise livre à partir de novembre 2010 six hélicoptères équipés d'une version préliminaire du système de mission pour permettre au Canada de commencer les essais et les activités d'instruction. La première livraison a cependant encore glissé de deux mois, ce qui a amené le gouvernement canadien à menacer d'imposer à Sikorsky des amendes pouvant atteindre 8 millions de dollars.

Aves les années, le coût total du contrat est passé de 2,8 millliards, en 2000, à 5,7 milliards, à l'heure actuelle. Ce montant comprend les coûts d'entretien pour les 20 prochaines années. Selon la vérificatrice générale, le coût du projet passe à 6,2 milliards si on tient compte des investissements nécessaires pour prolonger la vie des hélicoptères Sea King.

Manque de pièces

Outre le programme des hélicoptères canadiens, UTC aura un autre souci au cours du deuxième trimestre: l'approvisionnement de microprocesseurs et d'autres pièces électroniques fabriquées au Japon.

«Nous continuons à travailler avec nos fournisseurs pour rechercher des sources alternatives et nous assurer des stocks adéquats, a déclaré M. Hayes. S'il y a une perturbation dans l'approvisionnement, son impact ne se fera sentir que vers la fin de l'année. Je veux souligner que cette question ne change en rien nos prévisions pour l'année.»

UTC est également la société mère de Pratt & Whitney Canada. L'entreprise de Longueuil n'a livré que 606 moteurs au premier trimestre, comparativement à 633 au cours du même trimestre de l'exercice précédent.