Le plan de transports en commun de Toronto vient de prendre un autre virage brusque qui laisse Bombardier Transport (T.BBD.B) dans l'incertitude.

En vertu d'un contrat de 770 millions de dollars accordé en juin dernier, le fabricant devait construire 182 tramways pour la mise en place de 4 nouvelles lignes. Jeudi, le maire de Toronto, Rob Ford, récemment élu, a annoncé un nouveau plan aux côtés du premier ministre ontarien, Dalton McGuinty.

Au lieu de construire 52 kilomètres de nouvelles lignes de tramway, Toronto n'en construira que 25 kilomètres. Le nouveau plan abandonne notamment une des quatre nouvelles lignes, le long de la rue Finch, pour la remplacer par un service d'autobus amélioré. Résultat: Toronto n'aura besoin que de 130 nouveaux tramways.

«Ce sont de mauvaises nouvelles pour nous», a lancé le président de la section locale 1075 des Travailleurs canadiens de l'automobile (TCA), Paul Pugh, lors d'un entretien téléphonique avec La Presse Affaires.

La section locale 1075 représente les employés de l'usine de Bombardier Transport à Thunder Bay, qui construira les tramways.

M. Pugh a indiqué que le carnet de commandes de l'usine de Thunder Bay était bien rempli, mais que les nouvelles commandes étaient toujours les bienvenues, afin d'assurer du travail pour des années à venir.

Le niveau des effectifs à Thunder Bay a beaucoup varié dans le temps, selon l'état du carnet de commandes. À l'heure actuelle, un millier de personnes travaillent dans cette usine, dont près de 700 membres des TCA.

«Lorsque j'ai commencé à travailler ici, il y a 25 ans, il y avait 1200 membres des TCA, a indiqué M. Pugh. Mais il y a quelques années, il n'y en avait que 260.»

Revirements de situation

Le contrat des tramways de Toronto a déjà donné lieu à maints revirements de situation. Bombardier avait participé à un premier appel d'offres en 2008, mais la Commission de transport de Toronto (TTC), qui pilotait alors le dossier, avait rejeté sa soumission parce qu'elle ne respectait pas certains critères techniques. Les adversaires de Bombardier soutenaient notamment que les tramways du fabricant risquaient de dérailler dans les courbes serrées de la capitale ontarienne.

Comme la TTC avait rejeté la seule autre soumission (celle d'un petit fabricant britannique qui n'avait produit qu'un seul prototype de tramway), elle avait dû reprendre le processus. Bombardier avait remporté ce nouvel appel d'offres grâce à certaines modifications à son projet. La société de transport du grand Toronto, Metrolinx, qui avait pris la relève de la TTC, avait accordé à Bombardier un premier contrat pour 204 tramways en juin 2009. Une nouvelle commande pour 182 tramways avait suivi un an plus tard.

Le président de Bombardier Transport, André Navarri, ignorait encore jeudi dernier quels seraient les impacts du nouveau plan de la Ville de Toronto.

«Nous n'avons pas encore eu de nouvelles de notre client, Metrolinx, a-t-il déclaré lors d'une conférence téléphonique. Il leur appartient de nous dire s'ils veulent rediscuter de tout cela ou pas.»

Il a toutefois souligné qu'avec le carnet de commandes actuel, il n'y avait pas d'inquiétudes à avoir au sujet de l'usine de Thunder Bay.

La porte-parole de Metrolinx, Vanessa Thomas, a refusé de spéculer sur les pénalités que Toronto pourrait avoir à payer pour modifier le contrat de Bombardier.

«C'est une discussion que nous devons avoir avec Bombardier», a-t-elle déclaré à La Presse Affaires.

Le nouveau plan de transport du maire Ford comprend également le prolongement de la ligne de métro Sheppard de 13 kilomètres, ce qui pourrait se traduire par des commandes pour des voitures de métro de Bombardier. Toutefois, ce prolongement devrait faire l'objet d'un partenariat public-privé qui n'est pas encore précisé.

«Ce n'est pas un très long prolongement, il n'y aura donc pas beaucoup de voitures concernées, a fait observer M. Pugh. Nous serions heureux de les construire, mais nous ne verrons pas ce prolongement avant 2020, s'il se réalise.»