Si l'industrie aéronautique canadienne ne prend pas le virage vert, elle perdra du terrain et le Canada devra probablement abandonner sa position de cinquième puissance mondiale en aéronautique.

«Nous allons nous retrouver en fond du peloton, avec tous ceux qui n'ont pas pris ce virage, a affirmé le directeur des technologies stratégiques chez Bombardier Aéronautique, Fassi Kafyeke, en marge de la première conférence annuelle du Groupement aéronautique de rechercher et développement en Environnement (GARDN), organisée hier à Ottawa. Ce sera très difficile de se distinguer.»

Les industries qui n'auront pas pris le virage environnemental proviendront essentiellement de pays émergents, qui auront une autre façon de se différencier: des coûts plus bas, donc des prix en conséquence. Le Canada ne pourra pas gagner sur ce terrain.

De leur côté, les États-Unis et l'Europe investissent massivement dans la recherche et le développement de technologies vertes.

Le directeur du partenariat public privé européen Clean Sky, le directeur du développement aéronautique de la société de recherche française Onera (financée par l'État français) et le chargé de projets du volet «avion écologique» de la NASA ont d'ailleurs profité de la conférence de GARDN pour exposer les projets de recherche en cours pour rendre le transport aérien plus acceptable sur le plan environnemental.

«Les États-Unis et l'Europe ont clairement indiqué que leurs produits vont se distinguer grâce à leur excellence environnementale, a déclaré M. Kafyeke dans une entrevue avec La Presse Affaires. Il faut que notre prochaine génération de produits soient également excellents d'un point de vue environnemental. En fait, ce critère pourrait devenir une barrière à l'accès au marché.»

Le GARDN, un réseau de centres d'excellence commandité par le gouvernement fédéral, mais dirigé par le secteur privé, constitue une des réponses de l'industrie aéronautique canadienne à ce défi. Il réunit notamment de grandes entreprises, des centres de recherche et des universités et a déjà mis en branle neuf projets de recherche.

L'industrie mondiale s'est donné des objectifs ambitieux: diminuer de 50% les émissions responsables des changements climatiques d'ici 2050, améliorer la qualité de l'air et diminuer le bruit.

«Chacun de ces buts, pris individuellement, est relativement facile à réaliser, mais c'est lorsqu'il faut mettre tout cela ensemble que ça devient compliqué», a commenté Fayette Collier, de la NASA.

Les participants à la conférence ont d'ailleurs passé la journée à examiner les différentes voies à prendre pour atteindre ces objectifs, et les écueils qui se présentent.

Par exemple, pour améliorer l'efficacité énergétique d'un appareil, on peut essayer d'améliorer son aérodynamisme, l'alléger en utilisant de nouveaux matériaux et le doter de moteurs plus performants.

On peut également utiliser des biocarburants qui sont moins dommageables pour l'environnement. Mais attention, il ne faut pas entrer en concurrence avec l'industrie alimentaire en utilisant des produits qui pourraient être utilisés comme source de nourriture, comme le maïs, ou en réduisant la surface des terres consacrées à l'alimentation.

Le chargé de projets du développement durable chez Pratt&Whitney Canada, François Richard, a également insisté sur la nécessité de considérer toutes les étapes de la production du carburant.

«S'il faut utiliser des tonnes de fertilisants et énormément de machinerie, on n'est pas plus avancés», a-t-il lancé.

L'aviation verte passe également par des procédés de fabrication moins énergivores et par une optimisation des trajectoires de vol.