Les compagnies aériennes, qui se remettent à peine de la crise, tentent de minimiser leurs coûts en multipliant les suppléments parfois substantiels pour des services jadis gratuits: une stratégie qui peut fâcher les clients mais qui marche, jugent les analystes.

Après plusieurs années de pertes accumulées en raison de la crise et de l'envolée des prix du kérosène, les transporteurs aériens américains sont repassés dans le vert cette année, mais continuent à rogner sur les coûts par tous les moyens et notamment en faisant payer des services qui faisaient jusque là partie intégrante du prix d'un voyage aérien.

Les bagages enregistrés, voire les bagages cabine, sont de plus en plus souvent facturés en supplément, à des prix compris entre 20 et 90 dollars selon les bagages et le voyage.

A cela s'ajoutent les repas, les boissons alcoolisées, les écouteurs, couvertures, divertissements et sièges au premier rang ou devant des portes de sortie, disposant de plus d'espace pour les jambes, également facturés en plus.

Certaines compagnies imposent déjà dans certains cas aux passagers obèses un supplément, voire l'achat d'un second billet, comme United Airlines ou SouthWest Airlines aux Etats-Unis.

Et le patron de la compagnie irlandaise Ryanair, qui n'est plus à une provocation près, a évoqué la possibilité de faire voyager les passagers quasi debout avec des sièges-tabourets pour gagner de la place et rajouter des passagers sur les vols pour les rendre encore plus rentables.

La société Avion Interiors a même présenté lors d'un salon professionnel cet automne le «Skyrider», un prototype de siège cabine de petite dimension avec une assise à mi-chemin entre le tabouret et la selle de cheval. Conçu pour de courtes distances, il n'est toutefois pas encore homologué par les autorités.

Pour Richard Aboulafia, analyste du secteur au cabinet Teal Group, l'hypothèse de voyageurs à peine assis est «à moitié sérieuse, au mieux», mais «le fait de dégrouper la tarification est une bonne stratégie».

«Ces tarifs supplémentaires sont exactement ce dont les compagnies aériennes ont besoin pour éviter les pertes ruineuses qui ont découlé de la transparence des prix sur internet», explique-t-il, «car les prix aériens n'ont cessé de baisser et les classes économiques demeurent un produit à peu de valeur ajoutée».

Un avis partagé par Jim Corridore, analyste de Standard and Poor's (SP), qui souligne que «cette année, pour la première fois depuis longtemps, les transporteurs gagnent de l'argent». Ils «ont encore besoin de baisser leurs coûts car ils savent qu'un jour ou l'autre, ils seront confronté à un nouveau retournement du marché», a-t-il ajouté.

D'après le cabinet Ideaworks, les transporteurs aériens vont tirer cette année 18,4 milliards d'euros des services additionnels facturés aux passagers.

Certaines compagnies à bas coût comme Ryanair ou la britannique Flybe tirent en moyenne 19,4% de leur chiffre d'affaires de ces frais supplémentaires, selon cette étude.

Les grands transporteurs américains, comme American Airlines, Delta ou United, en retirent 7,2% de leurs recettes.

Jim Corridore reconnaît que «les clients sont très mécontents de ces charges» mais souligne que «les prix des billets sont moins chers qu'il y a dix ans».

Mais pour M. Aboulafia, «le risque d'énerver les clients est minime» car ce ne sont pas les voyageurs de la classe économique qui font gagner de l'argent aux compagnies mais ceux de la classe affaires et de la première classe, qui paient beaucoup plus cher pour un service bien meilleur, et tout compris.