Air Canada (T.AC.B) demeure hésitante envers les prochains avions CSeries du montréalais Bombardier (t.bbd.b), malgré la promesse de bonnes performances d'exploitation.

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Le transporteur veut maintenant attendre les projets de modernisation d'Airbus et de Boeing avant de se commettre sur le remplacement éventuel de ses avions moyen-courriers d'environ 130 passagers.

«Nous ne prendrons pas de décision tant que nous n'aurons pas examiné toutes les propositions sur le marché. Et pour le moment, nous n'avons pas encore entendu la teneur des projets d'Airbus et de Boeing», a indiqué le président et chef de la direction d'Air Canada, Calin Rovinescu, en marge d'une conférence sur le transport aérien, hier à Montréal.

Selon lui, il pourrait s'écouler «jusqu'à 12 mois» avant qu'Air Canada décide de peaufiner ses plans de renouvellement de la partie de son parc aérien qui comprend 86 avions à allée simple de types Airbus 319, 320 et 321.

Entre-temps, le transporteur espère plus d'informations sur les plans de modernisation chez Airbus en particulier afin d'évaluer s'il devra se préparer à changer de modèle d'avions, ce qui pourrait avantager Bombardier.

«Les avions CSeries s'annoncent comme un très bon produit et nous continuons d'en suivre le développement. Cependant, nous voulons examiner toutes les propositions avant de prendre une décision, pour éviter de la regretter par la suite», a insisté le président d'Air Canada lors d'un point de presse, après son discours devant des délégués de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI).

Pour le moment, les projets attendus chez Airbus et son concurrent Boeing concernent surtout la motorisation de leurs avions à allée simple, ou «narrow bodies» dans le jargon aérien.

Avec de nouveaux moteurs plus efficaces, les petits biréactés d'Airbus et leur principal concurrent, le Boeing 737, pourraient demeurer un choix concurrentiel pour les transporteurs, avec l'avantage de moindres coûts de formation d'équipage.

Avec sa CSeries, Bombardier propose un nouvel avion conçu spécifiquement pour le marché des vols de 110 à 150 passagers, au lieu d'un avion adapté d'un modèle plus petit ou plus gros.

Bombardier promet aussi des avions qui, grâce à une nouvelle génération de moteurs, seront plus efficaces d'au moins 15% en coûts d'exploitation par rapport aux avions existants.

«L'achat d'avions est complexe et coûteux pour les transporteurs. Nous comprenons bien leur dilemme d'autant que le contexte économique demeure difficile», a commenté John Arnone, porte-parole de la division des avions commerciaux chez Bombardier Aéronautique, après avoir été informé des propos du président d'Air Canada.

«Cela dit, nous sommes convaincus que la CSeries sera une proposition de très grande valeur dans l'industrie, a poursuivi M. Arnone.

«Nous avons 90 commandes fermes à date et 90 options auprès de trois clients, et nous sommes en discussions avancées avec plusieurs autres clients.»

Le premier vol d'un avion CSeries à partir de l'usine de Bombardier à Mirabel est prévu dans deux ans, à la fin de 2012. L'entrée en service commercial de la version de 110 passagers est prévue un an plus tard. La version de 130 passagers devrait suivre en 2014.

Du côté d'Airbus et de Boeing, les projets de nouvelle motorisation pourraient prendre «au moins cinq ans» à se matérialiser, selon Michael Boyd, analyste en aéronautique basé au Colorado.

Même dans les meilleurs cas, les gains d'efficacité pour les coûts d'exploitation seraient limités «entre 5 et 10% au gros maximum», a indiqué hier M. Boyd. C'est pourquoi il s'attend au succès de la CSeries malgré la timidité des commandes initiales.

En contrepartie, avertit pour sa part Richard Aboulafia, analyste en aviation chez Teal Group en Virginie, Airbus et Boeing pourraient embêter Bombardier en se montrant «très agressifs» en matière de prix de leurs avions modernisés.

«C'est sans doute ce que veut attendre de voir Air Canada, selon M. Aboulafia. Airbus et Boeing peuvent chacun produire des centaines d'avions à allée simple chaque année. D'où des économies d'échelle qui leur permet d'offrir des rabais aux transporteurs à un niveau inabordable pour Bombardier.»