Le Groupe maritime Verreault croit que le Québec a bien peu de chances de monter à bord de la stratégie fédérale en matière de construction navale, dévoilée hier.

Pour sa part, Chantiers Davie, qui est présentement sous la protection de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies, voit cette stratégie comme un canot de sauvetage.

«Nous faisons face à Irving Shipbuilding, qui est soutenu par le gouvernement de Nouvelle-Écosse, a déclaré la présidente et chef de la direction du Groupe maritime Verreault, Denise Verreault. Nous sommes bons, mais nous ne faisons pas de miracles.»

Le ministre de la Défense nationale, Peter MacKay, a annoncé hier une vaste stratégie qui comprendra la construction de 28 grands navires et 100 petits navires pour la marine et la Garde côtière. Ce programme, qui s'étalera sur une trentaine d'années, nécessitera des investissements de 35 milliards de dollars.

Le ministre a indiqué qu'il sélectionnera deux chantiers navals canadiens pour les plus gros navires à l'issue d'un processus concurrentiel, équitable, ouvert et transparent. Le gouvernement entend signer des contrats avec ces chantiers d'ici deux ans.

Les autres chantiers navals pourront se partager les contrats liés aux plus petits navires et aux opérations de réparation et d'entretien de la flotte actuelle.

Mme Verreault a cependant émis des doutes quant au caractère concurrentiel du processus d'attribution des contrats pour les plus gros navires.

«Irving est le mieux positionné pour aller chercher la part du lion, a-t-elle déclaré. Chez Irving, ils savaient que ça s'en venait, ils ont réussi à convaincre le gouvernement de la Nouvelle-Écosse de leur donner des subventions pour améliorer le chantier d'Halifax et repartir le chantier de Shelburne.»

Les contrats pour les plus petits navires pourraient aussi être hors de portée, si le gouvernement fédéral décidait de les regrouper. C'est ce que le gouvernement avait fait dans le cas du projet de réfection des frégates de la marine.

«Au lieu de donner les contrats à la pièce, ils les ont regroupés et ont demandé des garanties financières qui ont fait en sorte que les chantiers comme le nôtre ont été automatiquement éliminés», a affirmé Mme Verreault.

La grande patronne du Groupe maritime Verreault, établi aux Méchins, a ajouté que les chantiers québécois faisaient face à une autre difficulté lorsque venait le temps de faire des soumissions pour la réfection de navires pour la marine ou la Garde côtière. Ils doivent assumer les frais de déplacement des navires. Or, ceux-ci sont surtout basés dans les provinces de l'Atlantique... tout près des chantiers Irving.

«Nous sommes toujours désavantagés, a lancé Mme Verreault. Ça fait des années que j'essaie de faire enlever ces frais de positionnement, qui n'existaient pas avant, mais je me heurte à un mur. Ça ne nous aide pas à améliorer nos installations ou à être plus concurrentiels, parce que nous devons toujours sabrer nos profits.»

Mme Verreault aimerait bien avoir une petite conversation avec le gouvernement du Québec pour discuter de sa propre stratégie vis-à-vis de l'industrie navale.

«Que veut le gouvernement du Québec? a-t-elle demandé. Est-ce qu'il veut vraiment avoir des retombées ou est-ce qu'il ira simplement à la messe dimanche prochain pour faire des prières et voir ce qui va en ressortir? Ce n'est pas à la grâce de Dieu, cette affaire-là.»

Même en pleine restructuration, Chantiers Davie s'est montrée plus optimiste. L'entreprise s'est dite bien positionnée, en raison de ses installations et de sa main-d'oeuvre qualifiée, pour devenir l'un des deux chantiers choisis pour les gros navires.

«Davie est le seul chantier avec les installations existantes pour construire les plus grands navires comme les navires de soutien interarmées pour la marine ou les grands brise-glace de la Garde côtière canadienne, a affirmé le président et chef de la direction de l'entreprise, Gustav Johan Nydal, par voie de communiqué. Nous croyons que cette annonce aidera l'entreprise dans son processus de restructuration en la rendant plus attrayante auprès de nouveaux investisseurs potentiels.»