Le géant de l'aéronautique américain Boeing (BA) s'enfonce dans les difficultés liées au développement de son «Dreamliner» et de son cargo 747-8: il a révélé mercredi une perte plus importante que prévu au troisième trimestre et divisé par trois ses prévisions de bénéfice pour 2009.

«Les nouvelles de Boeing empirent de mois en mois», a commenté Douglas McIntyre sur le site d'analyses financières 24/7.

Boeing a inscrit une perte de 1,6 milliard de dollars au troisième trimestre liée aux difficultés rencontrées par la production du 787, plus connu sous le nom de «Dreamliner», et du nouveau cargo 747-8.

Le groupe avait prévenu début octobre qu'il allait essuyer au troisième trimestre une charge exceptionnelle d'un milliard de dollars liée à des «coûts de production accrus» et à un marché «difficile» pour le nouveau cargo, mais la perte dépasse les attentes de Wall Street.

En outre, Boeing n'attend plus qu'un bénéfice de 1,35$ à 1,55$ par action pour l'ensemble de l'année contre 4,7$ à 5$ précédemment avancés. Une réduction «à couper le souffle», pour Douglas McIntyre.

«Nos programmes d'aviation commerciale et de défense continuent à faire face à un contexte difficile», a justifié le PDG Jim McNerney, lors d'une conférence d'analystes.

Il a reconnu que les retards à répétition avaient entraîné «quelques annulations de commandes», sans donner de chiffre, et que son groupe devait «faire mieux».

Depuis le lancement en 2004 du programme du long-courrier de moyenne capacité «Dreamliner», Boeing accumule retards et problèmes industriels.

Lors de la conférence, Jim McNerney a admis que son groupe avait sous-estimé la complexité d'une production incluant une part inédite de matériaux composites et éclatée sur plus de 40 fournisseurs dans le monde.

Le 787 doit entrer en concurrence avec l'A350, futur long-courrier de nouvelle génération de l'avionneur européen Airbus, lui aussi plombé par les retards et difficultés.

Le nouvel avion-cargo B747-8, plus long de 5 mètres que son prédécesseur pour une capacité supérieure de 16%, est lui destiné à remplacer la gamme vieillissante des 747 face à la concurrence du nouvel Airbus A380.

Boeing a indiqué que le premier vol du Dreamliner était toujours prévu pour la fin 2009 et sa première livraison au 4e trimestre 2010.

Il fait aussi valoir un carnet de commandes qui représente «près de cinq fois le chiffre d'affaires annuel de l'entreprise, à 320 milliards de dollars».

Mais pour Douglas McIntyre, le bilan de l'équipe de direction est indéfendable.

«Le conseil d'administration de Boeing doit demander à Jim McNerney de quitter son poste de PDG, a estimé l'analyste. Les actionnaires ont payé trop cher les folies de McNerney. Depuis deux ans, l'action de Boeing a chuté de 43%.»

«Il a déjà poussé vers la porte de sortie le patron de la branche d'aviation commerciale et n'a plus personne à qui faire porter le chapeau» pour les difficultés du 787 et du 747.

Fin août, l'avionneur avait annoncé une reprise en main de son département d'aviation civile par le patron de la branche de défense.

Interrogé sur les propos de cet analyste, M. McNerney a répondu que la direction entière de Boeing «partageait la responsabilité» des retards accumulés mais qu'elle tenait aussi «à partager les fruits du succès» du 787 une fois son lancement réussi.

Interrogé par ailleurs sur les propos du patron d'EADS Louis Gallois, qui avait déploré mardi que Boeing dispose du prix de l'avion-ravitailleur qu'il propose à l'armée de l'air américaine alors qu'EADS n'a pas en main le prix de l'avion de Boeing, M. McNerney a botté en touche.

«Je ne sais pas de quoi ils parlent», a-t-il affirmé.

L'action de Boeing reculait de 1,48% à 51,12$ à 12h30 dans un marché en légère hausse..