Les investisseurs sont demeurés méfiants envers la Banque Laurentienne, hier, malgré une longue intervention du PDG à la télévision et les invitations d'analystes à profiter de la chute du titre.

L'action de l'institution financière québécoise a reculé de 1 % hier. Elle avait cédé 8 % la veille après la divulgation d'anomalies liées à des prêts hypothécaires de la filiale B2B Banque.

« La réaction [des investisseurs] m'apparaît un peu exagérée », a dit le grand patron de la Laurentienne, François Desjardins, hier matin durant une entrevue d'une vingtaine de minutes sur les ondes de la chaîne d'information financière BNN.

François Desjardins, qui n'était pas disponible pour répondre aux questions de La Presse après son intervention, a expliqué à BNN ne pas avoir révélé plus tôt la découverte d'irrégularités entourant certains prêts parce que la valeur de ceux-ci n'était pas jugée « significative ».

Les rachats ne devraient pas avoir une incidence significative sur les activités, la capacité de financement ou les fonds propres de la banque.

« Par souci de transparence, nous l'avons indiqué dans notre rapport annuel parce qu'on doit expliquer les rachats effectués auprès de tierces parties. » - François Desjardins, PDG de la Banque Laurentienne

Les prêts problématiques compteraient pour 4 % du portefeuille de prêts hypothécaires vendus à des tiers. La banque avait souligné mardi dans son rapport annuel qu'elle pourrait devoir racheter jusqu'à 304 millions de dollars de prêts hypothécaires vendus à des tiers. Le montant définitif ne sera connu qu'à la fin de l'audit en cours.

François Desjardins a même qualifié de « fantastiques » la majorité des prêts problématiques. Le PDG affirme que certains prêts ont été jugés inadmissibles à la titrisation car ils ne respectaient pas les critères spécifiquement recherchés par un acheteur non identifié.

« Dans d'autres cas, il s'agit de prêts approuvés sans avoir obtenu des preuves de revenus ou d'actifs auprès du bureau de crédit ou ailleurs, ou parce que ces preuves n'ont pas été classées correctement », a-t-il dit au sujet de prêts assurés par « inadvertance ».

« Pour ce qui est des fausses déclarations, le terme paraît mal, mais ça fait référence à des clients ayant gonflé leurs revenus ou embelli leur situation financière en indiquant, par exemple, un revenu annuel de 70 000 $ alors qu'il est plutôt de 60 000 $. C'est notre travail de vérifier ce genre de choses. »

Aucun employé n'a été complice de fausses déclarations et les problèmes relatifs à la documentation ne semblent pas intentionnels, selon la banque.

« Personne ne perdra son emploi, mais certains employés en entendront parler lors de leur évaluation. » - François Desjardins

Le PDG a ajouté que de nouvelles mesures de contrôle de la qualité ont déjà été ajoutées et a également indiqué que les comparaisons avec les ennuis rencontrés plus tôt cette année par le prêteur alternatif ontarien Home Capital étaient injustifiées.

« Notre organisation est différente et la situation l'est aussi. La Banque Laurentienne existe depuis plus de 171 ans. Notre portefeuille de prêts, nos activités et nos sources de financement sont diversifiés et nous sommes reconnus pour être un prêteur conservateur », a-t-il dit.

Le jugement sévère des investisseurs à l'endroit de la Laurentienne a incité les analystes Lemar Persaud, de la Banque TD, et Sohrab Movahedi, de la BMO, à laisser tomber leurs suggestions de « conserver » pour recommander l'achat de l'action. Ils sont maintenant trois analystes à recommander l'achat, six à suggérer de conserver le titre et deux à en proposer la vente.

QUELQUES RÉACTIONS D'ANALYSTES

BANQUE TD

« Ma décision de dorénavant recommander l'achat est liée à l'évaluation relative du titre. La récente faiblesse fait en sorte que le titre se négocie avec un multiple de 1,1 x la valeur comptable et avec un escompte de 25 % par rapport aux comparables (estimations de 2019). J'aime le momentum de la Laurentienne dans le prêt commercial et les économies réalisées dans le réseau de succursales. »

- Lemar Persaud

BANQUE SCOTIA

« Dans ce qui fut une des plus folles séances boursières qu'il m'a été donné de voir pour un titre bancaire canadien, l'action de la Laurentienne a fluctué dans une fourchette de 13 % mardi. Dans le contexte actuel, les problèmes de documentation et d'admissibilité soulèvent des questions sur les méthodes de contrôle de la qualité et ces questions sont éloquentes compte tenu de la transformation entreprise par la banque. »

- Sumit Malhotra

RBC

« Il pourrait y avoir des risques au niveau de la croissance du portefeuille de prêts hypothécaires, des coûts de financement et de la réputation si les problèmes devaient s'avérer plus importants. »

- Darko Mihelic