Deutsche Bank a subi un nouveau coup dur après l'annonce d'une amende record de 14 milliards de dollars aux États-Unis pour solder un ancien litige lié aux «subprimes», même si la première banque allemande devrait au final payer moins.

Signe de l'inquiétude des marchés, le titre du géant de la finance a dévissé vendredi de 8,47 % à 11,99 euros.

Deutsche Bank, impliquée dans près de 8000 litiges judiciaires dans le monde, a déjà écopé d'une amende de 2,5 milliards de dollars pour manipulations du taux interbancaire Libor aux États-Unis.

Si elle était confirmée, cette amende de 14 milliards serait la plus importante jamais infligée à une banque étrangère aux États-Unis.

Le français BNP Paribas détient actuellement la palme, avec 8,9 milliards de dollars, écopés en 2014 pour avoir violé des embargos américains.

De nombreux analystes pensent que la sanction sera finalement moindre pour Deutsche Bank.

L'amende ne s'élèvera «probablement pas à 14 milliards de dollars, si l'on compare avec les autres banques également actives dans ces activités. On table plutôt sur 5 milliards de dollars», commente l'analyste Robert Halver, chez Baaderbank. «Mais c'est sûr, 5 milliards de dollars, cela fait mal, naturellement», ajoute-t-il.

La banque a déjà fait savoir dans un communiqué qu'elle n'avait «pas l'intention» de régler 14 milliards, ni même un montant proche de cette somme.

Le DoJ, département de la Justice américain, l'a invité à soumettre une contre-offre, a précisé Deutsche Bank, soulignant que les négociations «viennent seulement de commencer».

Le gouvernement allemand a dit s'attendre à un compromis, partant «du principe que cette procédure aboutira sur la base d'une égalité de traitement à un résultat juste», selon la porte-parole du ministère allemand des Finances Friederike von Tiesenhausen.

La banque d'affaires américaine Goldman Sachs avait trouvé un accord mi-avril sur une amende de 5,06 milliards de dollars également pour un litige lié aux «subprimes».

Crédits toxiques

Deutsche Bank est accusée, comme d'autres grandes banques, d'avoir vendu à des investisseurs avant l'éclatement de la crise financière de 2007-2008 des prêts hypothécaires résidentiels (RMBS), qui sont des crédits immobiliers convertis en produits financiers, tout en sachant qu'ils étaient toxiques.

Baptisée titrisation, cette tactique, utilisée abondamment par les grandes banques pour convertir des portefeuilles de prêts en titres financiers qu'elles cèdent ensuite sur les marchés, est jugée responsable des pertes abyssales subies en 2008 par de nombreux investisseurs, dont ceux ayant acheté les titres adossés aux fameuses «subprimes».

Deutsche Bank a mis de côté 5,5 milliards d'euros (6,2 milliards de dollars) au 30 juin pour résoudre des litiges en cours, selon des documents boursiers. Elle espérait, selon des sources proches, écoper d'une amende comprise entre 2 et 3 milliards dans le dossier des RMBS.

«Une amende supérieure aux provisions existantes renforcerait les chances d'une augmentation de capital», ce qui entamerait encore un peu plus la santé financière de la banque, prévient Christian Koch, expert chez DZ Bank.

Pour l'heure, l'agence de notation Standard and Poor's a estimé que la note BBB» attribuée à Deutsche Bank n'était pas affectée par ces négociations aux États-Unis.

Suppressions de postes

La banque allemande a annoncé vouloir solder les principaux litiges d'ici à la fin de l'année, dont ce dossier sur les crédits immobiliers.

Outre l'amende de 2,5 milliards de dollars, Deutsche Bank a également soldé un différend avec le DFS et la Réserve fédérale (Fed) qui l'accusaient de violations d'embargos américains contre la Syrie et l'Iran.

Le groupe n'en aura pas pour autant terminé avec les autorités américaines puisque le régulateur des services financiers de New York (DFS) enquête sur des soupçons de blanchiment d'argent supposé au sein de sa filiale russe.

Fragilisée par des scandales à répétitions qui plombent ses comptes via des milliards de provisions et un environnement difficile de taux bas, la banque mène par ailleurs une lourde restructuration et prévoit de fermer d'ici 2020 quelque 200 filiales en Allemagne et de supprimer près de 9000 postes au niveau mondial.