Après avoir pris la barre du Mouvement Desjardins il y a huit ans, alors que débutait une crise financière mondiale, Monique Leroux amorce le dernier droit de sa présidence avec « sérénité » et estime laisser une « maison en ordre ».

La première femme à avoir tenu les rênes du plus important groupe financier coopératif au pays connaîtra le 19 mars l'identité de la personne qui lui succédera et qui entrera en fonction le 8 avril.

« Je ne peux pas dire que tout est réglé et que tout est parfait, mais la personne qui prendra la relève aura certainement les moyens d'agir », explique Mme Leroux, au cours d'une entrevue accordée à La Presse Canadienne au Forum économique de Davos, en Suisse.

Desjardins a lancé le 11 janvier dernier le processus électoral afin de désigner le nouveau président. Mme Leroux demeurera trois mois de plus après la fin de son second mandat dans un rôle d'accompagnement.

Elle dit très bien se souvenir de ses premiers moments à la tête de Desjardins, une période où la coopérative - à l'instar de plusieurs institutions financières - était « ébranlée » en raison de la crise financière et d'une marge de manoeuvre quasi inexistante.

« Finalement, au bout du compte, notre base de membres a augmenté d'environ deux millions, nous avons doublé nos revenus, qui atteignent environ 15 milliards $, et les excédents ont plus que doublé », souligne-t-elle.

Le mandat de Mme Leroux, marqué par d'importantes acquisitions dans les secteurs des services financiers et de l'assurance, n'a pas été de tout repos. En 2009, dans la foulée de résultats diminués par les effets de la crise financière, la coopérative avait notamment annoncé la suppression de 900 postes afin de réaliser des économies.

Au fil des ans, certaines voix se sont aussi élevées pour critiquer la baisse des ristournes, alors que d'autres, dont l'ex-dirigeant Claude Béland, ont reproché au Mouvement Desjardins de trop mettre l'accent sur sa performance financière plutôt que ses membres.

« C'est sûr que lorsqu'on ne fait rien, personne ne peut nous critiquer sur le moment, répond Mme Leroux. On nous critique plus tard par contre. L'histoire du Mouvement a toujours été marquée par des gens, qui, à un moment donné, se sont sentis interpellés par le changement. »

Dans un milieu où la représentativité des femmes demeure insuffisante, la dirigeante de Desjardins ressent de la fierté à avoir réussi à faire « bouger l'aiguille ».

« Je le dis avec beaucoup d'humilité. Je pense qu'on a relevé le plafond. Il n'a pas sauté, mais on l'a amené plus haut. En 2009, je regardais notre bassin de candidatures. On avait beaucoup de femmes, mais pas suffisamment dans des postes de direction. Je me disais qu'on ne peut pas se priver de 50 % du talent », dit-elle.

Au congrès de 2013, la coopérative de Lévis s'était également engagée à se diriger vers la parité pour l'ensemble de ses dirigeants, rappelle Mme Leroux.

Sans commenter en détail la course à la direction qui se profile chez Desjardins, sa présidente et chef de la direction se permet un conseil : toujours gérer dans une perspective à long terme, malgré la pression.

« Piloter une entreprise de cette taille n'est jamais un fleuve tranquille, prévient Mme Leroux. Je crois que nous avons une marge de manoeuvre nous permettant d'absorber des chocs. Ceci dit, il ne faut pas être complaisant. »

Elle s'attend par ailleurs à une transition rapide et harmonieuse au sein de la coopérative, parce qu'une grande partie de l'équipe de direction implantée en 2009 est toujours en place.

Présente à Davos depuis 2009, Mme Leroux porte deux chapeaux cette année dans le cadre de son passage dans les Alpes suisses, puisqu'elle est également présidente de l'Alliance coopérative internationale.

Son séjour a été particulièrement occupé, explique-t-elle, alors qu'un rendez-vous n'attend pas l'autre, étant donné que l'accès aux décideurs ainsi qu'aux gens d'affaires est très facile.

À terme, elle souhaiterait voir l'Alliance participer à des groupes de travail ou de discussion au Forum économique mondial, où le plancher est principalement occupé par des dirigeants d'entreprises privées, décideurs politiques et chefs d'État.

« Je suis venue ici pour voir dans quelle mesure l'Alliance (...) pourrait contribuer à certains thèmes dans le futur », affirme-t-elle.