Les grandes banques de Wall Street ont affiché au deuxième trimestre des bénéfices en forte hausse, dopés par les recettes de courtage des marchés, des baisses de provisions et des dépenses, et doivent maintenant s'adapter à un environnement de taux d'intérêt plus élevés.

«Le climat bancaire a été fantastique pour les banques, particulièrement avant que les taux d'intérêt ne rebondissent» à partir de la fin juin, a remarqué Chris Low, chef économiste de FTN Financial.

La banque d'affaires Goldman Sachs a doublé son bénéfice au deuxième trimestre à 1,9 milliard de dollars et celui de sa rivale Morgan Stanley a bondi de 42% sur un an à 802 millions.

Les résultats de ces deux banques ont largement été tirés par un bond du chiffre d'affaires, grâce au courtage d'actions et à la gestion de fortune chez Morgan Stanley, ou aux investissements en propre et aux émissions obligataires chez Goldman.

Chez les banques généralistes, JPMorgan Chase, la première banque américaine en termes d'actifs, affiche une progression de son bénéfice de 31% à 6,5 milliards de dollars et Wells Fargo de 20% à 5,3 milliards.

Chez Citigroup la hausse du bénéfice atteint 42% à 4,2 milliards de dollars et +70% à 3,6 milliards chez Bank of America.

Ces belles performances sont toutefois largement dues non pas à la hausse du chiffre d'affaires mais essentiellement à une baisse des dépenses et à une baisse importante des provisions pour pertes liées aux crédits.

Pour Erik Oja, analyste de S&P Capital IQ, les banques ne pourront pas continuer éternellement à se serrer la ceinture: «il y a des limites à ce que les banques peuvent couper. Je pense que les dépenses vont rebondir aux troisième et quatrième trimestres», a-t-il estimé.

Côté recettes, les dirigeants des grandes banques ont mis en avant, à l'instar du patron de JPMorgan Chase, Jamie Dimon, la «faible croissance des prêts à cause de la prudence des consommateurs, de beaucoup de petites entreprises et de grands groupes».

En outre, les dirigeants des grandes banques se sont inquiétés, comme Michael Corbat de Citigroup, d'un retournement du boom du refinancement des prêts hypothécaires. La banque prend d'ailleurs «des mesures pour s'assurer que ses activités de prêts immobiliers sont à la taille appropriée», a fait valoir M. Corbat, ce qui pourrait annoncer des réductions d'effectifs.

Erik Oja estime qu'il sera en effet important pour les banques de parvenir à baisser leurs coûts dans l'hypothécaire si le boom du refinancement se tarit comme attendu.

Les provisions pour frais juridiques ont nettement augmenté chez JPMorgan Chase ou chez Citigroup. Elles ont chuté chez Bank of America mais le directeur financier, Bruce Thompson, a averti qu'elles resteraient fluctuantes et pourraient rebondir.

Les banques américaines, comme le reste du monde de la finance, se préparent à évoluer dans un environnement de taux d'intérêt plus élevés, pour le pire ou le meilleur.

La Réserve fédérale (Fed) a annoncé au printemps qu'elle envisageait de cesser ses programmes de rachats de titres obligataires si l'économie continue à se renforcer et qu'elle pourrait aussi commencer à remonter ses taux directeurs à partir de 2015.

Les taux d'intérêt à long terme ont commencé à remonter sur les marchés immédiatement après ces annonces, avec un effet à double tranchant pour les banques.

Des taux plus élevés peuvent nuire à la demande de prêts, d'émissions obligataires et de rendements hypothécaires mais sont favorables aux marges de crédits et au rendement des investissements.

Enfin, les plus grandes banques américaines sont confrontées à une réglementation changeante: les régulateurs américains ont proposé la semaine dernière un renforcement des normes de solidité financière des banques en faisant passer à 5% leur ratio de levier, à savoir les capitaux propres rapportés aux actifs. Ce serait un taux supérieur aux normes de Bâle III.

Des parlementaires, comme la démocrate Elisabeth Warren, ont en outre proposé de rétablir une séparation entre les banques d'investissement et de détail, instaurée après la crise de 29 mais disparue lors de la dérégulation des années 80 et 90. Il n'est toutefois absolument pas certain qu'ils obtiennent gain de cause.