Alors que l'endettement des ménages continue de gonfler, les associations de protection des consommateurs s'inquiètent de la popularité grandissante des marges de crédit, qui permettent d'emprunter facilement et n'imposent pas d'obligation de remboursement du capital.

Les marges de crédit sont souvent offertes par les institutions financières à leurs clients sans qu'ils en fassent la demande. Les nouveaux contrats hypothécaires, notamment, sont presque tous assortis de marges de crédit, que les consommateurs peuvent utiliser à leur guise. «On nous offre du crédit sur un plateau d'argent. C'est très difficile de dire non, et c'est très tentant de s'en servir», souligne Caroline Soulard, porte-parole de la Coalition des Associations de consommateurs du Québec (CACQ), dont les membres étaient réunis à Québec cette semaine pour discuter de problèmes d'endettement.

Les institutions financières permettent à leurs clients de ne payer que les intérêts sur les sommes empruntées sur leurs marges de crédit. Mais de cette façon, le solde ne diminue jamais. «C'est sans fin, et les gens s'exposent à des hausses de taux d'intérêt, explique Josée Pomerleau, syndic de faillite et secrétaire du Conseil des syndics du Québec. Ça prend une discipline à toute épreuve pour rembourser à la fois le capital et les intérêts.»

D'ailleurs, depuis quelques années, les soldes impayés sur des marges de crédit font de plus en plus souvent partie des dossiers des consommateurs qui font faillite, ajoute Mme Pomerleau. «Ces produits sont tellement intégrés dans les moeurs que bien des gens considèrent la limite sur leur marge de crédit comme un revenu disponible pour n'importe quelle dépense», note Marie Lachance, professeure en sciences de la consommation à l'Université Laval.

Comme les sommes empruntées pour des voitures, des piscines ou des voyages se retrouvent amalgamées à l'emprunt hypothécaire, au moyen de marges de crédit hypothécaire, les paiements pour ces biens s'étirent sur des périodes beaucoup trop longues, renchérit Daniel Gardner, professeur de droit à l'Université Laval, qui s'intéresse à la responsabilité des institutions financières dans le niveau d'endettement des ménages. «Sans oublier que, en cas de défaut de paiement, comme l'emprunt est garanti par la propriété, la maison peut être saisie», dit-il.

Autrefois, lorsqu'il fallait contracter un prêt personnel pour un achat important, les remboursements se faisaient au moyen de mensualités fixées à l'avance, et le consommateur savait combien d'intérêts il aurait à payer pour son emprunt. «Mais aujourd'hui, on ne sait pas à l'avance combien on paiera d'intérêts pour les sommes que l'on retire de notre marge de crédit, souligne Caroline Soulard. Et ça peut suivre le consommateur pendant très longtemps.»

Statistique Canada révélait hier que le niveau d'endettement des ménages avait augmenté de 5,5% en 2012, ce qui signifie que le ratio de la dette des ménages, soit le crédit par rapport au revenu disponible, s'établit maintenant à 165%. La dette hypothécaire totale des ménages était de 1100 milliards de dollars à la fin de 2012, et la dette de crédit à la consommation, de 477 milliards.